Pour la dignité des Roms en Europe : Roma Pride ! le 7 octobre 2012
La lassitude ou le désespoir auraient pu finir par nous gagner. Les persécutions contre les Roms, Tsiganes, Gitans et Manouches ne sont-elles pas séculaires ?
Les stéréotypes qui s’abattent sur eux n’ont-ils pas traversé les siècles, les pays et les régimes politiques ?
Ne serait-il pas illusoire de penser « normaliser » une situation qui peut apparaître désespérée ?
Par bien des aspects en effet, les violences contre les Roms en Europe semblent sans fin, et les difficultés pour qu’ils soient enfin pleinement insérés dans la société européenne, insurmontables.
Par exemple, en Europe centrale et balkanique, une puissante logique mortifère pousse à leur effacement. Ainsi, relégués à la lisière des grandes agglomérations, ils sont entassés dans des quartiers séparés par des murs, sans eau courante ni électricité, dans de nombreux villages.
C’est le cas notamment en République Tchèque à Ostrava, en Slovaquie à Michalovce, Košice, Prešov et Svinia, en Roumanie à Tarlungeni et Baia Mare, d’où les Roms ont été récemment expulsés vers une usine chimique désaffectée pleine de produits hautement nocifs.
On ne compte plus les ghettos urbains en Bulgarie, où le parti Ataka avait organisé en 2011 des manifestations aux cris de « Les Roms en savon ! » dans une vingtaine de villes. En Hongrie, les milices paramilitaire du Jobbik terrorisent les Roms, comme à Gyongyospata qu’ils sont obligés de fuir, et entraînent régulièrement des meurtres racistes tandis que le gouvernement organise, sous couvert de mesures anti-fraudes aux allocations sociales, de véritable camps de travail ouverts pour Roms.
De plus, les expulsions continuent en France comme sous le précédent pouvoir, et elles se poursuivent en Allemagne, Suède et Italie.
Enfin, les discriminations raciales quotidiennes concernant la santé, le travail, les loisirs et l’éducation persistent au Kosovo, au Portugal, en Serbie, en Croatie ou encore en République Tchèque.
Alors que cet état de fait aurait pu nous faire sombrer dans le désespoir, c’est à l’engagement, pour la dignité et pour l’égalité des droits, qu’il nous pousse.
C’est pourquoi, dimanche 7 octobre, nous marcherons dans nos pays, en tête de la société civile européenne unifiée sur tout le continent, de la Norvège à la Serbie et du Portugal à la Pologne, en passant par l’Italie, la Roumanie, la Hongrie et la Bulgarie, pour clamer ensemble : « Roma Pride ! »
Malgré ce qu’avancent les oiseaux de mauvais augure et les désespérés de lassitude, notre espoir de voir les individus issus d’une des plus anciennes communautés européennes reconnus dans leur dignité n’est pas vain.
En effet, au niveau institutionnel, l’Union Européenne a accompli certaines avancées : pour la première fois, tous les Etats Membres ont dû élaborer et présenter à la Commission, fin 2011, une « Stratégie nationale d’insertion des Roms ».
Cependant, comment croire que certaines stratégies puissent être suivies d’effet quand elles ne sont dotées d’aucun budget ni d’aucun calendrier ? Comment ne pas comprendre qu’il s’agit alors d’évitement, propice à la perpétuation des violences et des discriminations ?
Surtout, émerge aujourd’hui en Europe une élite Rom dont l’objectif est simple et clair : la pleine égalité, des devoirs et des droits. Cette élite, composée de femmes et d’hommes politiques, d’intellectuels, d’artistes et de militants, n’est pas isolée. Elle est à la fois
fortement ancrée dans les communautés et partie intégrante de la société civile européenne.
La Roma Pride est donc une mobilisation d’auto-émancipation et d’accompagnement à l’autoémancipation
par le politique, portée par la société civile quelles que soient les origines des individus et des organisations impliqués, car l’universalisme est notre inspiration et la pleine insertion dans la société notre revendication partagée.
Cette pleine insertion ne signifie pas une acculturation ou la rupture du lien de transmission de cultures, d’identités et d’histoires riches de leurs diversités et qui font partie intégrante du patrimoine européen.
Elle signifie, partout, la fin des meurtres racistes, le démantèlement des ghettos, la fin de la stigmatisation des Roms à des fins politiques et la fin des lois discriminatoires et des dispositions « exceptionnelles » qui en pratique visent les Roms, comme celles concernant les accords de Schenghen et qui entravent la liberté de circulation en Europe. Elle signifie une lutte résolue pour déconstruire les stéréotypes, pour combattre les discriminations à l’emploi et au logement, et la fin de la ségrégation dans l’éducation. Elle signifie, enfin, la reconnaissance des responsabilités individuelles et nationales dans les persécutions contre les Tsiganes, notamment de la part des pays d’Europe alliés à l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Pour l’égalité des droits, la pleine insertion dans la société européenne et le respect de la dignité de tous, marchons ensemble le 7 octobre dans toute l’Europe pour la Roma Pride !
En France, la mobilisation nationale, qui aura lieu à Paris à 14h, place du Panthéon, sera co-organisée avec l'Union Française des Associations Tsiganes - UFAT et SOS Racisme, rejoints notamment par l'UEJF et la Confédération étudiante.
Benjamin Abtan, Président du Mouvement Antiraciste Européen EGAM (European Grassroots Antiracist Movement – EGAM), et, par pays :
France : Cindy Léoni, Présidente de SOS Racisme, et Alain Daumas, Président de l’Union Française des Associations Tsiganes – UFAT
Abanie : Aldo Merkoci, Président de Mjaft ! Movement et Adriatik Hasantari, Président de Roma Active
Allemagne : Serdar Yazar, Porte-parole de la Turkish Union in Berlin-Brandenburg (TBB)
Autriche : Claudia Schäfer, CEO de ZARA, Alexander Pollak, Président de SOS Mitmensch et Andrea Härle, Directeur Exécutif de Romano Centro
Bosnie : Alma Masic, Directrice de Youth Initative for Human Rights -Bosnia
Bulgarie : Krassimir Kanev, Président du Comité Helsinki, et Deyan Kolev, Président du Centre rom Amalipe pour le dialogue interethnique et la tolérance
Croatie : Mario Mazic, Directeur de Youth Initiative for Human Rights – Croatia
Danemark : Anne Nielsen, Présidente de SOS mod racism, et Ferdi Sabani, Président de Roma Forzning i Danmark
Finlande : Janette Grönfors, Coordinatrice de Rasmus, réseau contre le racisme, et Membre fondatrice de Nevo Roma
Grèce : Ahmed Moawia, Coordinateur du Forum Grec des Migants
Hongrie : Janos Farkas, Président du Gouvernement de la minorité Rom de Gyöngyöspata, et Erika Muhi, Directrice de NEKI
Italie : Angela Scalzo, Présidente de SOS Razzismo, et Olga Bala, Présidente de Partita Romilor
Kosovo : Raba Gjoshi, Directrice de Youth Initiative for Human Rights – Kosovo, et Osman Osmani, Directeur de Initiative 6
Lettonie : Sigita Zankovska-Odina, Chercheuse du Latvian Center for Human Rights
Moldavie : Nicolae Radita, Président du Roma National Center
Monténégro : Boris Raonic, Président de Civic Alliance, et Teuta Nuraj, Président de Nacionalni Savjet Roma i Egipcana
Norvège : Kari Helene Partapuoli, Directrice du Antirasistisk Senter
Pologne : Kasia Kubin, Directrice de la Foundation Forum for Social Diversity, Paula Sawicka, Présidente de Open Republic Association, et Roman Kwiatkowski, Président de la Roma People Association in Poland
Portugal : Frida Kruijt, Directrice Exécutive par interim de Amnistia Internacional-Portugal, et Bruno Gonçalves, Vice-Président du Centro de Estudios Ciganos
République Tchèque : Anna Šabatová, Présidente du Comité Helsinki, Jarmila Baláová, Présidente de Romea, et Marie Gailova, Présidente de Romodrom
Roumanie : Marian Mandache, Directeur Exécutif de Romani Criss
Russie : Svetlana Gannushkina, Présidente du réseau des droits des migrants de Memorial
Serbie : Maja Micic, Directrice de Youth Initiative for Human Rights – Serbia, et Jovana Vukovic, Coordinatrice du Regional Centre for Minorities
Slovaquie : Irena Bihariova, Présidente de Ludia proti rasizmu Suède : Mariam Osman Sherifay, Présidente de Centrum mot Rasism
Turquie : Selcuk Karadeniz, Président de la Roma Youth Association, et Cengiz Algan, Porte-parole de Durde !
Ukraine : Zola Kundur, Présidente du fonds pour les femmes roms Chiricli
Commenter cet article