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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Paroles de Palestine 1999 : Quel avenir pour les réfugiés ?

23 Janvier 2011 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Palestine, #Palestine Réfugiés

Paroles de Palestine 1999 : Dossier complet

Jalal Al Husseini

Département des Affaires des réfugiés, maison de l'Orient

 

unrwa1988.jpgLa position officielle des Palestiniens de l'OLP concernant le problème du retour (ou du non retour), a été formulée et mise en évidence dans la résolution 194-111 (11/12/1948–Assemblée générale de l'ONU) qui propose et garantit aux réfugiés le choix entre la « compensation » et le « retour ».

Évolution palestinienne.

La compensation est depuis Madrid envisagée par les Palestiniens comme une des solutions possibles alors qu'auparavant, dans certains milieux, cela était considéré comme une trahison, seul le retour était envisagé, c'était même la priorité du projet de libération de la Palestine. Actuellement, la position officielle c'est d'abord le droit au retour, ensuite le droit à la compensation.

Intransigeance israélienne.

Des discussions sur la compensation ont lieu au niveau « académique » entre Israéliens, Palestiniens et experts internationaux. Pour l'instant les Israéliens ne veulent pas entendre parler du droit au retour ; leur principe de base : aucun réfugié ne rentrera, sauf dans le cas des mécanismes de réunification familiale qui ont d'ailleurs toujours eu lieu, mais c'est un processus extrêmement lent qui concerne surtout les déplacés de 67. Il faut faire la différence entre les réfugiés de 48, les déplacés de 67 et les réfugiés-déplacés, ceux qui réfugiés de 48 dans le camp de Jéricho ont été déplacés en 67.

Le droit au retour :

c'est la grande question qui va être débattue dès le début des négociations. Les Palestiniens vont la mettre en avant. Les Israéliens ne veulent pas que ce problème soit abordé, ils vont invoquer des facteurs de sécurité, d'impossibilité... Nous disons que le retour est possible. Nombre de villages ont été détruits ou rasés, mais pas tous, certains n'ont pas été remplacés par des implantations, si bien que techniquement, la réinstallation des réfugiés est possible, même si cela va demander beaucoup d'argent. Mais tout va coûter de l'argent, la compensation également. Il faut rappeler qu'à la suite des accords de paix israélo-jordaniens, une commission tripartite israélo-jordano/palestino-égyptienne réunie pour discuter du retour des déplacés de 67 était restée bloquée après une dizaine de séances sur la question de la définition du déplacé ; on mesure les difficultés qu'il y aura à trouver un accord sur la définition du statut de réfugié. Selon l'UNRWA, les réfugiés seraient au nombre de 3,5 millions (1) mais un recensement exhaustif n'a jamais été réalisé. Un grand nombre de réfugiés ne sont pas inscrits, certains parce qu'ils considéraient que c'était une atteinte à leur dignité, d'autres parce qu'ils se trouvaient en dehors des zones opérationnelles , on doit donc arriver à un chiffre qui se situerait entre 4,8 et 5 millions de personnes, lequel prend en compte ceux qui sont partis et leurs descendants.

La compensation.

Les mêmes difficultés vont apparaître pour déterminer quels seraient les bénéficiaires de la compensation, en fixer les modalités et résoudre le problème du financement. Cela va prendre beaucoup de temps. A qui verser les compensations ? A ceux qui ont gardé leur titre de propriété ou à tous les réfugiés ? La majorité étant à l'époque métayers va-t-on leur verser une compensation ? Dans quelle proportion déterminer la compensation entre ceux qui étaient métayers et ceux qui étaient de grands propriétaires terriens, et qui, pour la plupart, ont pu se « refaire » financièrement ailleurs ? Eux aussi considèrent qu'ils ont subi une perte tant matérielle que psychologique. Enfin qui est détenteur des droits : uniquement le père ou les droits se transmettent-ils ?

nous-retournerons.jpgLes Israéliens vont mettre toutes sortes de barrières. Pour l'instant, ils proposent que les compensations ne soient versées qu'à ceux qui peuvent prouver qu'ils avaient des titres de propriété et qui sont dans le besoin, ce qui limiterait évidemment leur nombre. Nous sommes contre. Certains Israéliens sont pour une solution définitive : on paie et c'est fini. On s'acheminerait alors vers une solution du style verser à chaque réfugié ou à chaque famille une somme égale, rien n'empêchant ensuite les individus de réclamer devant des tribunaux israéliens la restitution de leurs biens ou une compensation pour leur terre. La position israélienne consiste à créer un fonds, à identifier les personnes ayant droit à une compensation, c'est ce qu'ils appellent « corrected justice », solution qui permettrait de dire tous les réfugiés ont subi le même tort, tous les réfugiés ont droit à la même compensation (qu'ils soient réfugiés d'un camp ou riches milliardaires). Le droit international sur ce point leur donne raison : le fait pour un Etat de payer une compensation n'implique pas que ses torts soient reconnus. C'est une phase préparatoire et sur ce point précis, les Israéliens sont prêts à aller extrêmement vite, pour ne plus avoir à revenir sur le passé et y chercher, par exemple, les raisons de l'exode des Palestiniens. Concernant le montant global des compensations, il serait de 7 milliards de dollars US (1984) selon le point de vue israélien, et de 140 milliards pour les estimations palestiniennes maximales. Ceci concerne tout à la fois les biens mobiliers et immobiliers. Jusqu'à quel point les donateurs vont-ils accepter de donner de l'argent pour la compensation, pour le rapatriement, la réinstallation soit en Israël, soit dans les pays d'accueil.

L'heure des choix.

Les Palestiniens ont longtemps vécu sur des slogans. Quand les Israéliens vont dire : qui d'entre vous a envie de rentrer ? Qui a envie de rester ? Il va falloir faire des choix. Un certain nombre de Jordaniens Palestiniens n'ont aucune envie de rentrer mais ils veulent avoir le droit de revenir s'ils en ont envie, de pouvoir investir, etc. Les réfugiés sont parfois mieux en Syrie, en Jordanie, et même ceux du Liban, qui vivent dans des conditions très difficiles (2), n'ont pas forcément envie de revenir , ils sont nés ailleurs, ils ne savent pas ce qui les attend ici.

Pour l'instant, on ne voit que retour ou réinstallation, mais, il y a toutes sortes de possibilités intermédiaires : on irait à très long terme vers une sorte d'Etat bi-national, ou de région où les gens pourraient circuler, déménager, emménager comme c'est le cas dans l'Union européenne.

1 1 487 449 en Jordanie, 367 610 au Liban, 370 035 en Syrie, 562 737 en Cisjordanie, 785 551 à Gaza (chiffres de l'UNRWA, l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens au Proche Orient)

2 Au Liban, 60 métiers sont toujours interdits aux Palestiniens (concierge, caissier, chauffeur de taxi, médecin, avocat, ingénieur, pharmacien...)

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