Paroles de Palestine 1999 : Parcours d'un ancien prisonnier politique
31 Janvier 2011 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Palestine Prisonniers
Paroles de Palestine 1999 : Dossier complet
Ali Jiddah
Je fais partie de la communauté afro-palestinienne de la vieille ville. En 1936, mon père et un petit groupe d'Africains de retour de la Mecque se sont installés à Jérusalem, troisième lieu saint de l'islam. A dix-sept ans, après la guerre des Six Jours, j'ai commencé à subir les vexations, à souffrir de l'humiliation de l'occupation, des atteintes à ma dignité personnelle et nationale. Je me suis alors engagé au sein du FPLP du docteur Georges Habbache, un Palestinien chrétien, et en 1968, j'ai participé à deux attaques à l'explosif contre des objectifs civils israéliens, toujours en réponse à des bombardements israéliens contre des villes jordaniennes. J'ai été arrêté après les aveux d'un camarade, j'avais dix-huit ans. Condamné à 20 ans, j'ai passé dix-sept ans en prison et j'ai été libéré à la suite d'un échange de prisonniers.
Lorsqu'on me demande si je suis encore prêt à placer une bombe, je réponds non. D'abord pour des raisons humaines. Ensuite pour une raison politique, une bombe, c'est du métal et ça ne peut pas faire la différence entre d'une part des civils israéliens qui veulent vivre en paix avec les Palestiniens et des colons qui ne le veulent pas. Je n'ai pas de problème avec Israël, avec l'État d'Israël, le problème, c'est la nature colonialiste, raciste de l'État d'Israël.
Ce qui décide des résultats des négociations, c'est la « balance » des forces. Malheureusement nous sommes la partie la plus faible, c'est pour cela que les Israéliens nous imposent leurs conditions et puis, à mon sens, Arafat est complètement défait depuis sa sortie de Beyrouth. Convaincu par l'émissaire américain, Philip Habib de quitter le Liban contre l'assurance d'une solution politique en vue de la création d'un État palestinien, il ne regarde que dans la seule direction américaine. Il ne voit ni à droite, ni à gauche. Il voit seulement devant lui les Américains, et les Américains le « tirent » lentement, lentement. De plus, j'ai beaucoup d'inquiétude sur sa façon souvent antidémocratique de fonctionner : il décide de beaucoup de choses par lui-même et ce n'est pas toujours au bénéfice du peuple palestinien. Les territoires autonomes, ça veut dire quoi lorsque ce sont les Israéliens qui contrôlent les routes, les déplacements des gens, et que lui-même Arafat lorsqu'il veut se rendre de Gaza en Cisjordanie, doit en avertir les Israéliens.
La paix, c'est la stabilité, la prospérité, la sécurité physique et psychologique, c'est ne pas penser que chaque jour on peut faire irruption chez toi. Or, on assiste toujours à des violences de la part des colons, à des démolitions de maisons, à des arrestations. Où est la paix ? La masse des plus pauvres grandit, alors qu'en haut se développe une petite élite composée d'affairistes. Etre contre Oslo, cela ne veut pas dire être contre la paix, mais je veux une vraie paix durable qui ne génère dans l'avenir ni violences ni misère. Je veux dès maintenant l'application de toutes les résolutions internationales, droit à l'autodétermination, droit d'avoir un État indépendant, droit au retour (ou à la compensation) pour les 3,5 millions de réfugiés de la diaspora. Alors qu'un juif de n'importe quel pays a droit au « retour » en Israël, les Palestiniens qui sont à l'extérieur depuis 1948 ne peuvent toujours pas rentrer.
L'acceptation de ces résolutions par les Israéliens prouverait qu'ils veulent véritablement la paix. Actuellement, c'est le moment propice pour y arriver car les Palestiniens comme la majorité des Israéliens sont fatigués. Mais devant les blocages israéliens, le risque immédiat, c'est de voir éclater une nouvelle Intifada, encore plus forte qu'en 1987. A terme, la situation idéale, c'est" d'avoir deux Etats indépendants. Nos deux peuples ont besoin de temps pour dépasser l'histoire des hostilités, de la violence, mais dans le futur, la solution la plus raisonnable, la plus réaliste et humaine, c'est d'avoir un seul État laïque et démocratique. Pour l'instant, c'est utopique, et on en est encore loin. Pourtant avant 1917, Arabes et juifs ne vivaient-ils pas en bons voisins ? Mais pour l'instant Arafat a pour objectif d'avoir un État indépendant, d'aller prier à la mosquée d'Al Aqsa et de hisser le drapeau palestinien sur les minarets et les églises alors que de leur côté les Israéliens se refusent à démanteler les colonies qui restent source de tension, ils considèrent toujours le Jourdain comme la frontière Est de leur Etat et Jérusalem comme la capitale historique et éternelle d'Israël.
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