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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

ONU-Palestine.. Je suis comme un âne qui doute (Paul Monmaur)

28 Novembre 2011 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Palestine Nations Unies

 

ONU - PALESTINE…

Je suis comme un âne qui doute !

26 Novembre 2011

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La décision de créer un Etat juif en Palestine a été prise au 7ème congrès sioniste de Bâle, en 1905. « La Palestine était  une terre sans peuple pouvant naturellement accueillir un peuple sans terre » : le peuple juif ; telle était la justification fallacieuse de cette décision ! C’est le premier jalon qui trace la voie qui allait mener à la colonisation de la Palestine. Il y en aura beaucoup d’autres, certains ont été cruciaux comme :

  • la déclaration Balfour, en 1917, par laquelle la Grande-Bretagne marque son soutien au projet sioniste qui s’intègre parfaitement aux intérêts stratégiques et économiques de sa politique impériale ;

  • la résolution 181, adoptée par l’Assemblée générale (AG) de l’ONU le 29 novembre 1947, en violation de sa charte, qui recommande la partition de la Palestine entre Juifs et Arabes ;

  • et surtout l’auto proclamation de l’Etat d’Israël, le 14 mai 1948, par les sionistes eux-mêmes, notamment le premier d’entre eux : Ben Gourion.

On connaît la suite : révolte du peuple palestinien, entrée en action des armées et milices sionistes avec un bilan catastrophique côté palestinien : plusieurs milliers de morts, autant de blessés, 400 à 500 villages détruits, 14 villes rasées, 800 000 personnes en fuite ou expulsées dont femmes, enfants et vieillards, etc… Dès 1949, 80% du territoire de la Palestine était confisqué puis colonisé par les sionistes (voir carte I en fin de document). Dans les 20 % restants, notamment en Cisjordanie, la colonisation s’est poursuivie inexorablement (voir carte II). Ce territoire est aujourd’hui criblé d’implantations israéliennes, solidement ancrées, abritant plus de 450 000 colons. Elles fragmentent la terre palestinienne en îlots isolés (voir carte II), paralysant ainsi la vie de ses habitants, selon une stratégie coloniale dont les conséquences se veulent irréversibles. Dans la bande de Gaza, la survie même des habitants dont 80% sont des réfugiés, est menacée par des raids aériens fréquents et par un blocus meurtrier. Bref, les effets les plus dévastateurs de la colonisation, notamment « sociocides », ont fait et font toujours leur œuvre.

La conquête coloniale de la Palestine par les armées et milices sionistes n’aurait jamais été possible sans le soutien politique, économique, scientifique, financier et militaire de l’impérialisme occidental, notamment celui de la Grande-Bretagne et de la Françe d’abord, puis des Etats-Unis et de l’UE ensuite. Ce soutien a été d’importance variable dans le temps mais il a été continu. Il est massif aujourd’hui. Ce qui explique pourquoi, en dépit de sa modeste superficie (20 000 km2, soit environ celle de 3 départements français) et de ses 6 millions d’habitants seulement (l’équivalent de la population d’une métropole européenne moyenne), Israël est devenu la 4ème puissance militaire du monde. C’est grâcenotamment à ses centaines de têtes nucléaires, à ses puissantes bases aériennes et navales, à un équipement militaire et un système de renseignement ultramoderne ,et à un réseau médiatique et de propagande vaste et sophistiqué. Ce surarmement par rapport à ses capacités réelles et l’hyperpuissance militaire qui en résulte, Israël le doit donc aux largesses des politiques impériales de l’occident et, quoique à un moindre degré, à son système de lobbying efficace et à une diaspora solidairement indéfectible. Bref, Israël n’est, en somme, pas autre chose qu’une colonie majeure de l’impérialisme occidental, son bras armé qui, en alerte permanente et constamment menaçant, aide à l’extension puis au maintien de son hégémonie sur tout le Proche et le Moyen-Orient, principales réserves mondiales d’énergies fossiles et régions géostratégiques de première importance.

Les Palestiniens n’ont jamais cessé de résister à la colonisation sioniste. En témoignent les rebellions violentes de 1920-22 et de 1936-39, les grandes révoltes de 1947 et 1948, les soulèvements (intifada) de 1987 et 2000, sans compter les milliers de morts et de blessés, les centaines de milliers de réfugiés et pas moins de 10 000 Palestiniens enfermés dans les geôles israéliennes. Pour autant, en terre palestinienne, la vie et les espoirs ne sont pas les mêmes selon que l’on est bourgeois à Ramallah ou réfugié ou descendant de réfugiés vivant dans des camps disséminés à Gaza, au Liban, en Syrie ou encore en Jordanie… A Ramallah, la bourgeoisie souhaite la reprise des affaires et se rapproche de l’autorité palestinienne qui, résignée, tente de sauver ce qui peut encore l’être, au moins le croît-elle, de la Palestine, quitte à collaborer avec le gouvernement sioniste et l’impérialisme qui le soutient. Dans les camps de réfugiés, au contraire, la misère est immense et la désespérance est totale ; les jeunes habitants qui ont tout perdu pensent que la force est le seul moyen de retrouver leurs droits, notamment le droit au retour dans les foyers d’origine : un désir et une volonté rendus irrépressibles par la dépossession et l’accumulation des frustrations, des humiliations et des souffrances endurées pendant des décennies. Cette division socio-économique et idéologique de la population palestinienne se concrétise, sur le terrain, par l’affrontement armé, épisodique mais meurtrier, entre factions d’un même peuple, embryon de guerre civile qui peut dégénérer et, ce faisant, pourrait détruire la société palestinienne, au moins ce qu’il en reste.

Palestine ONU2Récemment, Mahmoud Abbas, le Président de l’autorité palestinienne a déposé, devant l’ONU, une demande d'adhésion d'un Etat de Palestine à cette organisation. Si elle était acceptée, elle aurait valeur, aux yeux de beaucoup, d’une reconnaissance d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, c’est à dire sur un territoire fragmenté (Gaza et Cisjordanie) et s’étendant sur moins de 15% de la Palestine historique si l’on prend en compte les implantations sionistes ancrées en Cisjordanie et qui, de plus,accaparent toutes les ressources en eau de la région. Cette démarche du président Abbas vers une organisation aux ordres des puissances dominantes soulève plusieurs questions laissées sans réponses. Quel Etat, avec quelle économie, quelle défense, quelle souveraineté ? Pour quelle population ? Quel sort sera réservé aux 4,5 millions de réfugiés, en particulier ceux des camps, dont le droit au retour est numériquement incompatible avec le sionisme et l’existence de l’entité sioniste ? Quel avenir pour les Palestiniens israéliens (20% de la population totale), au sein d’un « Etat juif » à forte idéologie sioniste qui, aujourd’hui, ne fait pas mystère de sa nature élitiste, théocratique, communautariste, xénophobe et raciste ? Enfin, quelle est la légitimité de l’autorité palestinienne et du conseil national palestinien dont les mandats, largement expirés, n’ont pas été re-soumis au vote populaire ?

Bien sûr, les Palestiniens, y compris et surtout les réfugiés qui constituent la substance même de la cause palestinienne, doivent répondre, démocratiquement, c’est à dire sur la base d’un débat public suivi d’une consultation populaire, à ces questions fondamentales qui engagent, avec un fort risque de non retour, leur avenir.

Dans ce contexte complexe et incertain, une réponse positive de l’ONU, peu probable aujourd’hui pour des considérations électorales étatsuniennes mais vraisemblable dans un proche avenir, risque d’accroître la confusion et l’inquiétude au sein même de la société palestinienne déjà traumatisée par 60 années de tragédie. Le nouvel Etat palestinien, croupion et sans réelle souveraineté, pourrait se trouver dans l’obligation de gérer les problèmes intra-palestiniens qui sont insolubles dans un cadre politique aussi contraignant et un cadre territorial aussi exigu et fragmenté, sauf à sacrifier les intérêts des composantes les plus fragiles et démunis de la population palestinienne. De plus, les Palestiniens ne seraient pas rétablis dans tous leurs droits dits inaliénables, notamment celui au retour sur leurs terres et celui à l’autodétermination. Ce qui pourrait créer, au sein même de la société palestinienne, des frustrations irréductibles aux conséquences délétères, voire explosives. A l’inverse, les sionistes seraient « de facto » absouts de tous leurs crimes et Israël serait irréversiblement validé et consolidé sans faire de concessions politiques, idéologiques et territoriales significatives. Ce serait là non pas une victoire du peuple palestinien et de ses soutiens mais une démission face à la politique impériale occidentale, un renoncement aux droits fondamentaux, l’acceptation d’une injustice inacceptable et un oui au statu quo de l’occupation coloniale israélienne.

Cette situation ne saurait constituer une garantie d’une paix juste et durable dans cette région du monde devenue, sous les coups de boutoirs impérialistes et pour des motifs multiples, notamment géoéconomiques et géostratégiques, une poudrière comme le prouvent la mise à sac de l’Irak et le chaos politique, économique et social qui en résulte, la guerre d’Afghanistan ou encore la menace de plus en plus précise d’une attaque militaire contre l’Iran qui s’oppose fermement à l’exploitation impériale du proche et du Moyen-Orient.

Dans pareille conjoncture, pour l’essentiel générée par un impérialisme de plus en plus agressif et son appareil onusien, comment ne pas être comme un âne qui doute au sujet de l’opportunité de la démarche de l’autorité palestinienne vers l’ONU ?

Il y a un point, en revanche, dont on ne saurait douter : ceux qui, à travers le monde, notamment occidental, combattent pour la justice, la solidarité, le respect des droits et l’amitié entre les peuples doivent s’impliquer dans la recherche d’une solution « juste et pérenne » au problème du Proche-Orient, en général, et à la tragédie des Palestiniens, en particulier. L’objectif doit être clairement défini et l’investissement militant massif et déterminé : comme cela a déjà été dit par d’autres,  « il ne s’agit pas d’arbitrer entre deux peuples en lutte pour la même terre mais de remettre en cause un Etat pivot de l’impérialisme au Proche et au Moyen-Orient et de combattre pour l’émancipation de tous, Israéliens compris».L’enjeu est considérable. Qui peut agir pour atteindre cet objectif mieux que les peuples américains et les peuples européens, au moins leurs composantes désireuses de construire une société démocratique et humaniste ? Les leviers sont nombreux ; les boycotts en font parti mais il faudra plus. Des mouvements populaires forts, capables d’imposer de changements majeurs d’orientation politique à la tête des Etats, sont nécessaires. A cet égard, l’activité d’organisations israéliennes progressistes, les contestations populaires qui se développent face à une régression sociale sans précédent, sous diverses formes, un peu partout en occident et les révoltes contre les dictatures qui ont déstabilisé certains pays arabes sont des signes encourageants. L’extension et la coordination de ces divers mouvements sont de nature à ouvrir la voie à une dynamique de luttes efficientes contre le capitalisme et les politiques impériales qui sont à l’origine de la tragédie palestinienne et la cause de son maintien. Nul doute que le combat sera long et difficile. Mais il est juste et il peut et doit être victorieux ! Cela afin de permettre l’émergence d’un Etat démocratique, laïque, solidaire et humaniste, s’étendant sur toute la Palestine historique, dans lequel cohabiteraient, loin des tentations ethniques, confessionnelles et impérialistes, et dans le respect des droits de chacun, Juifs, Arabes et d’autres encore qui le désireraient. Un Etat qui aurait valeur d’exemple et pour nom « la république démocratique de Palestine », tout naturellement.

Paul Monmaur, universitaire, retraité. A participé à la Marche Internationale pour Gaza, en décembre 2009.

 


 

Carte I (ci-dessous). Colonisation de la Palestine historique - en vert - de 1947 à 2005 (Avec l’autorisation de l’auteur)

 

cartes israel raye Palestine

 

En 46 : la terre de Palestine (les points blancs indiquent la présence des premiers colons juifs).

 

Carte II (ci-dessous). Colonisation de la Cisjordanie : toute les zones aux mains d’Israël ont été transformées en mer.

Source : http://miltondassier.over-blog.com/article-29717631.html - 2009 -

 

archipel palestine2

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