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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Nouvelle donne au Liban ?

27 Janvier 2011 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Proche et Moyen-Orient, #Liban

Nouvelle donne au Liban ?

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Présenté comme le candidat du Hezbollah, Najib Mikati qui vient d’être nommé premier ministre par le président libanais Michel Souleiman et chargé de former le nouveau gouvernement libanais, se trouve contesté par une grande partie de la communauté sunnite.

Au cœur même de ce regain de tension et des risques d’affrontements qui menacent une nouvelle fois le Liban, la publication prochaine par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) de son acte d’accusation et de l’implication probable du Hezbollah dans l’assassinat en février 2005 du président libanais Rafic Hariri, le leader sunnite le plus représentatif de ces dernières années.

Un Tribunal spécial

Le TSL a été créé en mai 2007, à la demande de l’Etat libanais, par la résolution 1757 du Conseil de sécurité des Nations Unies, chargé d’enquêter sur l’assassinat de Rafic Hariri et d’en juger les responsables.

Si le TSL a des points communs avec d’autres juridictions internationales comme celles relatives au Rwanda, à l’ex-Yougoslavie ou à la Sierra Leone, c’est la première fois qu’un tribunal international juge non pas des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité mais un crime relevant d’une catégorie nouvelle, le terrorisme.

D’autre part, contrairement aux procédures habituelles des autres tribunaux internationaux, l’ouverture du procès pourra s’effectuer en l’absence physique des accusés et donner lieu à un jugement par défaut.

Dans un pays, le Liban, dont les assassinats ont fait une trentaine de victimes parmi les personnalités politiques, dont deux chefs d’Etat (Bachir Gemayel en 1982 et René Moawad en 1989), cette action en justice laisse la porte ouverte à des interprétations contradictoires : volonté de mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs de ces assassinats politiques ou occasion d’instrumentaliser la justice pour déligitimer ou nuire à un mouvement comme le prétendent des sources proches du Hezbollah.

 

Un Tribunal contesté

Le Hezbollah et les partis qui lui sont proches contestent de fait ce tribunal qui selon eux porte atteinte à la souveraineté libanaise.

D’une façon générale, le TSL a depuis le début été instrumentalisé par les forces libanaises en présence, servant de levier dans les affaires intérieures soit pour renforcer le gouvernement soit pour le faire tomber.

De même au niveau international, le TSL a pu être considéré par certaines grandes puissances comme un moyen d’infléchir la situation au Moyen-Orient dans une tentative de redistribuer les cartes et d’infléchir la situation au Moyen-Orient et de mettre à mal les « alliances » réelles ou supposées entre la Syrie, l’Iran et le Hezbollah.

Ainsi les premiers rapports internationaux ont d’abord privilégié la piste syrienne, le gouvernement El Assad étant présenté comme le commanditaire dans ce qui est paru comme une instruction à charge et ce n’est qu’après que les enquêteurs libanais allaient porter leurs soupçons sur les chiites du Hezbollah mettant en lumière l’existence d’un réseau de téléphone en relation avec l’attentat, un appel mettant en cause un membre du parti de Hassan Nasrallah.

Pour ce dernier, le TSL est à la solde des Etats-Unis et d’Israël, il y aurait eu manipulation, les réseaux téléphoniques libanais étant infiltrés par les services secrets israéliens.

 

Colère de la communauté sunnite

Pour la communauté sunnite, la chute du gouvernement de Saad Hariri, provoquée par la démission des ministres du Hezbollah, a marqué un revers certain dans sa volonté de voir le Hezbollah affaibli du fait de sa mise en cause par la justice internationale d’autant que le nouveau premier ministre libanais est accusé d’être trop enclin à prendre en considération les exigences du Hezbollah : en particulier que le Liban se retire du TSL en retirant les 4 juges libanais qui y siègent et en cessant de financer le tribunal (49 % des frais sont à la charge du Liban).

Des raisons d’espérer

Elles tiennent d’abord à la personnalité même du nouveau premier ministre qui contrairement aux autres dirigeants libanais n’est pas issu d’une dynastie politique du pays : homme d’expérience, il a déjà été premier ministre à titre provisoire pendant trois mois en 2005, après l’assassinat de Rafic Hariri, homme de consensus, il est capable de travailler avec toutes les composantes politiques du Liban. Soutenu également par une partie du mouvement druze de Walid Joumblatt, il vient d’entamer les discussions en vue de former son gouvernement en tendant la main à tous les partis politiques libanais. De son côté, Saad Hariri, le premier ministre sortant qui a refusé dans un premier temps de participer à un gouvernement avec le Hezbollah aux commandes, en l’absence d’un engagement clair en faveur du TSL, n’en a pas moins appelé à la retenue ses partisans qui ont manifesté contre ce qu’ils considèrent comme un coup d’Etat du Hezbollah.

Au niveau international, alors que les régimes arabes se trouvent de plus en plus fortement contestés par leurs peuples, une nouvelle crise au Liban déstabiliserait la région. Parce qu’au Liban, le piège des appartenances confessionnelles peut à tout moment se réactiver, l’ensemble des pays appellent les partis politiques libanais à la retenue. Pour Hilary Clinton, qui en la circonstance a dû au moins provisoirement tirer les enseignements d’une politique étatsunienne par trop interventionniste, c’est aux Libanais de décider de leur avenir. Quant à la France, qui selon les propos de Nicolas Sarkozy « mobilise toute son énergie et tous ses moyens pour le peuple libanais ne soit pas demain déchiré par une nouvelle crise », gageons qu’ils ne seront pas démentis dans les faits par les décisions du président de la République. ! ! Néanmoins, ce relatif consensus face à la conduite à tenir envers la situation au Liban peut-il tenir dès lors que pour Israël, il faut empêcher le Liban d’être l’otage du Hezbollah et de l’Iran ?

Y.M.

Illustration choisie par le webmestre : mémorial Rafik Hariri

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