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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Les « Blancs », le racisme « anti-blanc », les « Indigènes de la République » .. et le MRAP..

6 Décembre 2012 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #"Racisme anti-blanc"

Une première version partielle de cette étude avait été publiée en juillet 2011. Une nouvelle, remaniée après le congrès du MRAP, en avril 2012. Cette dernière n'est plus en ligne à son emplacement d'origine. La remise en ligne actuelle sur "Repères" ne tient pas compte des récents développements du débat (tribunes publiées sur Rue 89, le Monde, etc..).

Les analyses développées dans cette série d'articles sont celles personnelles et évolutives de l'auteur à un moment déterminé et ne doivent être considérées que comme une introduction au débat. FM


Préambule

Ce texte est une introduction au débat, sur un sujet éminemment sensible et miné. Dans son projet d'orientation1, la nouvelle direction du MRAP, élue au congrès de 2012, aborde la question en ces termes :


« Promouvoir des identités artificielles et « uniques », qu'elles soient nationales, religieuses, ethniques ou raciales, conduit inéluctablement au racisme. Ces enfermements identitaires émanent des groupes dominants, mais se reproduisent dans les groupes dominés : le racisme anti-blanc2 en représente un avatar. Le MRAP le condamne à ce titre d’autant plus qu’il apporte une inacceptable et dangereuse non-réponse aux méfaits et aux séquelles de la colonisation. »

A chaque fois que l'on importe dans son référentiel de valeurs un concept venu d'ailleurs, il est indispensable de procéder à des clarifications. A défaut, on prend beaucoup trop de risques. Et même quelque fois celui du ridicule, en confondant injure raciste et jugement esthétique : qualifier Caroline Fourest de Jeanne d'Arc au teint de porcelaine n'est pas une injure raciste.3.

Brève histoire de la notion de race.

Ne soyons pas angéliques : il est probable que les premières sociétés organisées se soient créées en définissant d'abord qui en faisait partie et qui en était exclu. Les Grecs qualifiaient de « barbares » les non-grecs , littéralement ceux qui bégayaient le grec. Très vite, les gens des pays voisins sont caractérisés par leur apparence physique ou leur façon de se vêtir, dès lors qu'elle est différente de celle des autochtones.

Les tributaires éthiopiens, représentés sur la frise de l'Apadama à Persépolis apportant un okapi comme tribut au roi des rois, sont reconnaissables à leur chevelure.


tributaires ethiopiens captifs asiatiques captifs-africains.jpg
 Tributaires éthiopiens
 Captifs asiatiques
 Captifs africains

 

(Droits réservés pour ces photos)

 

Ramsès II fait représenter sur le temple d'Abou Simbel les peuples vaincus : on reconnaît très facilement les Africains (noirs) et les habitants du Proche-Orient.

Et personne ne nie que l'apparence physique « standard » des paysans de la vallée du Yang-tsé-Kiang ait été différente de celle de leurs homologues de la vallée du Nil, et qu'elle l'est encore.

Mais le passage à la notion soi-disant scientifique de race, au sens biologique du terme, ne s'est fait que bien plus tard.

Les premières lois racistes européennes furent les lois espagnoles de « pureté du sang ». Promulguées à la fin du XVème siècle, discriminant non pas sur la base de l'apparence physique, de la couleur de la peau, etc.. mais sur la base de la religion, elles visent les juifs et les musulmans, et leurs descendants, même convertis au catholicisme. Ils sont donc persécutés, interdits d'exercer des responsabilités, ils le sont non pas parce qu'ils ont telle couleur de peau, etc.. mais parce qu'ils sont accusés de pratiquer la mauvaise religion ou d'être tentés d'y retourner.

Si on fait une recherche sur le mot « race » dans les anciens dictionnaires français, depuis celui de Jean Nicot (1606), on constate qu'au début, le mot « race » a trois significations :

  • la famille, le lignage, on parle de race des Bourbons, etc.

  • personnes ayant la même caractéristique « la race des usuriers »

  • les races animales.

On ne parle pas de races humaines.

Le terme n’apparaît que dans l'édition de 1835 du dictionnaire de l'Académie :

RACE se dit, par extension, d'une multitude d'hommes qui sont originaires du même pays, et se ressemblent par les traits du visage, par la conformation extérieure. La race caucasienne. La race mongole. La race malaise. Les habitants de ce royaume, de cette province sont une belle race d'hommes.

Le « par extension » est à noter.

Bien que tardif, ce sens connut rapidement un très grand succès. Le biologiste suédois Linné avait effectué un travail remarquable de classement des êtres vivants. Non content de définir des règles encore actuelles pour les espèces animales, il a tenté de subdiviser l'espèce humaine en « races » : blanche, noire, jaune, rouge, avec à chacune son continent et son caractère.

Cette classification eut un succès fantastique, et certains ne tardèrent pas à établir une hiérarchie entre les races humaines ainsi définies.

A titre d'exemple, cette image est extraite du « Tour de France par deux enfants », écrit par « G. Bruno ». L'édition ici reproduite (1893) est la 229ème ! Plusieurs millions d'écoliers français ont lu ce livre, de lecture, de morale, de sciences, d'histoire, de géographie.

races-humaines.jpg

 

Il faut noter que l'auteure, Augustine Fouillée, qui remaniera elle-même le livre dans un sens de moins en moins religieux, a choisi le pseudonyme de G. Bruno en hommage à Giordano Bruno, victime de l'Inquisition notamment à cause de ses théories rationalistes. Preuve que l'on pouvait à la fois se croire sincèrement progressiste, ennemie de l'obscurantisme et exposer très naturellement des théories racistes.

D'autres prirent le relais, expliquèrent que les « blancs » comprenaient plusieurs catégories, elles-mêmes hiérarchisées, confondues avec les groupes de locuteurs d'une même famille de langues. La suite est malheureusement connue : le nazisme. Les Européens se firent entre eux, de façon systématique et industrielle, ce qu'ils avaient fait aux Amérindiens, aux Africains.

Aujourd'hui, la plupart des scientifiques s'accordent pour dire que :

  • l'espèce humaine (homo sapiens sapiens) est relativement récente par rapport à d'autres

  • sa diversité génétique est moindre que celle d'espèces animales proches

  • mais elle va très au-delà des simples différences d'apparence physique : la répartition des groupes sanguins et tissulaires n' a pas grand chose à voir avec celle des « races », et sa connaissance est vitale en cas de greffe ou de transfusion.

Les essais de classification des êtres humains en fonction de l'apparence physique extérieure aboutissent très rapidement à des impasses, surtout si on essaie de les corréler avec d'autres critères ou ce qu'on sait de l'histoire du peuplement de la Terre.

Par exemple, on trouve des gens très foncés (des « noirs »), en Afrique subsaharienne, en Inde du Sud et en Océanie. Ils sont très différents les uns des autres, et personne ne croit sérieusement à une souche commune et distincte de celle des gens plus clairs. Il y aurait donc trois « races noires » ! Et c'est ainsi que certains biologistes en sont arrivés à distinguer plusieurs dizaines, voire centaines de races humaines4.

Le voyageur qui remontait la vallée du Nil ou suivait la route de la soie passait insensiblement de l'Européen au teint clair à l'Africain très foncé ou au Chinois lui aussi très différent. Il n'avait pas l’impression de groupes humains distincts. L'impression était celle du changement progressif. Tout autre était l'impression du navigateur, qui débarquait après plusieurs semaines de voyage sur un rivage peuplé de gens très différents de ceux qu'il avait quittés. Il y a peut-être là un début d'explication au développement des théories de classification de l’humanité en grands groupes raciaux ;

Bref, pour un biologiste, un généticien, les races humaines n'existent pas, et si certains admettent l'existence de facteurs génétiques propres à certains groupes humains, les groupes ainsi définis n'ont pas grand chose à voir avec les « races » habituellement admises.

Quant aux races animales, on oublie trop facilement que ce sont des créations humaines, d'abord empiriques, puis plus scientifiques, en fonction des besoins des éleveurs. Et certaines sont très récentes. Les races bovines normande et charolaise, par exemple, ont été créées au XIXème siècle par croisement entre des races locales et des taureaux anglais Durham.


 

2 Sans guillemets ni définition.

4 Un synthèse très claire sur ce site : http://www.hominides.com/html/dossiers/race.php consulté le 7 avril 2012.

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