La justice autorise les boycotts politiques
6 Octobre 2011 , Rédigé par Repères antiracistes Publié dans #Palestine BDS
L’appel au boycott des produits d’un État par un citoyen n’est pas interdit par le droit français
Le tribunal de la 17ème Chambre correctionnelle du Palais de Justice de Paris, spécialisée dans les affaires de droit de la presse, diffamation publique, liberté d’expression, a rendu un jugement de la plus haute importance et de la plus grande clarté, à propos du droit qu’ont les citoyens et consommateurs d’appeler au boycott d’Israël et de ses produits. Il nous concerne tous. Voici les attendus du jugement. Merci de les diffuser largement.
Ce jugement, dont les attendus sont précis et très étayés, fait d’ailleurs l’objet d’un commentaire très intéressant dans la dernière édition de la Gazette du Palais (Septembre 2011 n° 244, P. 15), sous l’intitulé : « LIBERTÉS PUBLIQUES : L’appel au boycott des produits d’un État par un citoyen n’est pas interdit par le droit français », et sous la plume du magistrat Ghislain Poissonnier.
Ces attendus doivent être connus et lus avec d’autant plus d’attention que la campagne BDS s’amplifie dans le monde entier, mais que d’autres procès BDS doivent se dérouler prochainement en France, à commencer par celui du 20 OCTOBRE 2011 à BOBIGNY, ceci en raison de l’obéissance remarquable du gouvernement Sarkozy à tous les desiderata israéliens.
POURQUOI LES CITOYENS ONT LE DROIT D’APPELER AU BOYCOTT D’ISRAEL
Les juges qui nous ont entendus le 17 juin dernier, ont relaxé le 8 juillet 2011 Oliva Zémor, accusée de discrimination contre la nation israélienne, et d’incitation à la haine raciale par le gouvernement et par quatre associations du lobby israélien en France, en soulignant que :
« Dès lors que l’appel au boycott des produits israéliens est formulé par un citoyen pour des motifs politiques et qu’il s’inscrit dans le cadre d’un débat politique relatif au conflit israélo-palestinien, débat qui porte sur un sujet d’intérêt général de portée internationale, l’infraction de provocation à la discrimination fondée sur l’appartenance à une Nation n’est pas constituée. »
Le juge a expliqué le 8 juillet, lors du rendu de ce jugement que l’article de loi invoqué par les parties civiles (article 24, alinéa 8, de la loi de 1881) est destiné à « lutter contre toutes les formes de racisme » et ne « saurait être invoqué pour interdire un appel au boycott « invitant à une certaine forme d’objection de conscience, que chacun est libre de manifester ou pas » et « lancé par des organisations non gouvernementales ne disposant d’aucune prérogative de puissance publique »
S’appuyant sur des décisions de la Cour de Cassation et de la Cour européenne des Droits de l’Homme, le tribunal fait remarquer que :
« La critique d’un Etat ou de sa politique ne saurait être regardée, de principe, comme portant atteinte aux droits ou à la dignité de ses ressortissants sans affecter gravement le liberté d’expression dans un monde désormais globalisé dont la société civile est devenue un acteur majeur, et alors qu’aucun ’délit d’offense à Etat étranger’ n’a jamais été consacré par le droit positif ni par le droit coutumier international, tant il serait contraire aux standards communément admis de la liberté d’exprimer des opinions ».
Le tribunal a ajouté, en s ‘appuyant sur les exemples développés par les avocats de la défense, Me Antoine Comte, Me Dominique Cochain, et Me Henri Choukroun, que « les autres appels, émanant de certains secteurs de la société civile, au boycott de tels produits en provenance d’un pays ou d’une entreprise sont nombreux, sans qu’ils aient jamais été incriminés dans l’ordre des abus de la liberté d’expression » .
Le juge passe ainsi en revue de très nombreux appels anciens et récents au boycott de produits, du tourisme dans certains pays, de jeux olympiques dans d’autres, dont le boycott de l’année du Mexique en France en 2011 et le boycott des produits birmans par l’enseigne Carrefour.
Il met également l’accent sur le fait que l’on ne peut en aucun cas nous accuser de « provocation à la discrimination, la violence ou la haine à l’égard d’un groupe de personnes à raison de son appartenance à la nation israélienne, puisque certains secteurs de l’opinion israélienne soutiennent l’appel BDS ». (Il se réfère explicitement aux déclarations de la Coalition israélienne des Femmes pour la Paix, des Israéliens qui demandent aux artistes internationaux de ne pas venir se produire en Israël, et au soutien apporté par de nombreuses personnalités allant de Desmond Tutu à des ministres, parlementaires ou intellectuels français, que l’on ne peut soupçonner d’un quelconque racisme.)
Examinant les avis contraires présentés par les parties civiles, le tribunal fait observer que : « La confrontation des points de vue est précisément de nature à convaincre que l’appel pacifique et sans contrainte au boycott des produits israéliens est indissociable du débat d’opinion que suscitent partout dans le monde les préoccupations liées au règlement d’un conflit endémique depuis plus de 60 ans. ».
ACTION BDS IRREPROCHABLE
Le tribunal a donc conclu , en ce qui concerne la publication de cette vidéo BDS par Olivia Zémor sur le site www.europalestine.com , et en ce qui concerne le contenu de la vidéo, que :
« La mise en ligne d’une vidéo de quelques minutes durant laquelle des militants ont appelé les consommateurs d’une enseigne de la grande distribution à ne pas acheter des produits en provenance d’Israël et à soutenir un tel boycott pour des motifs politiques sur un sujet d’intérêt général de portée internationale qui mobilise depuis des années la communauté internationale, pour l’heure en vain, en vue d’un règlement pacifique du conflit ne caractérise en aucun de ses éléments le délit de provocation à la discrimination, la haine ou la violence contre un groupe de personnes à raison de son appartenance à une nation, en l’espèce Israël ».
De même, « Les propos de présentation de cette vidéo, incontestablement militants, sont indissociables de l’appel au boycott que la prévenue est libre de soutenir pour exprimer ses vues sur le conflit israélo-palestinien. »
A noter au demeurant que le tribunal de la 17ème Chambre correctionnelle de Paris a jugé « irrecevable » l’une des parties civiles, la Chambre de Commerce France-Israel .
Les parties civiles ont bien entendu fait appel de ce jugement, et continuent à poursuivre des militants pour les mêmes faits, en espérant avoir affaire, ailleurs, à des juges et à des procureurs, plus influençables et moins soucieux de faire respecter la liberté d’expression.
CAPJPO-EuroPalestine
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