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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Forum du 20 janvier 2012 à Grasse Intervention de Walid, membre du Comité de soutien à Hakim Ajimi

27 Janvier 2012 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Police Justice

 

Forum du 20 janvier 2012 à Grasse

 

Intervention de Walid, membre du Comité de soutien à Hakim Ajimi

(Propos recueillis par Y.M. & A.V.)



grasse forum 16 Walid et père Hakim« Depuis le début, la vérité est manifeste, et pourtant depuis le début on veut nous cacher cette vérité. Depuis le début, on nous parle de procédure, de délais, d’attente administrative… Au bout de quatre ans, l’affaire est enfin devant le tribunal, en correctionnelle. S’il peut arriver que dans le cadre de l’exercice de leur fonction, les policiers aient à répondre d’un accident involontaire, là dans le cas de Hakim, il ne s’agit aucunement d’un accident, il s’agit pour nous d’un véritable meurtre. Ainsi malgré la gravité des faits, les policiers ne sont pas devant les Assises où pour des raisons analogues, un quelconque citoyen, l’un d’entre vous, se verrait sans aucun doute infliger la peine maximale.

La correctionnelle, dans le cas d’un homicide involontaire, c’est quand, par exemple, on renverse quelqu’un avec sa voiture, accidentellement, et que suite à cela, la personne décède.

Dans le cas d’Hakim, la situation est toute différente. Les policiers, alors même qu’il est pieds et mains menottés, le maintiennent plaqué au sol et l’empêchent de respirer. Malgré les protestations de témoins - il y en a même un qui a voulu intervenir, il finira au commissariat- l’agonie d’Hakim continue jusqu’à sa mort par asphyxie, une mise à mort en quelque sorte.

 

Que les forces de l’ordre doivent assurer la sécurité, nous le savons, mais pour nous il reste totalement inadmissible que les policiers contrôlent quelqu’un vivant, en bonne santé et le restituent mort à sa famille et à ses proches.

Malheureusement, des cas semblables sont en train de se reproduire en France : le jeune, à Clermont-Ferrand par exemple, n’est pas sorti d’un braquage avec prise d’otages. Les policiers l’ont interpellé vivant, sur un banc, pour le laisser dans le coma. Maintenant il est six pieds sous terre. La police comme les autorités ne semblent guère s’en soucier, ni se soucier de sa famille qui souffre de sa disparition. Et sa mort est traitée comme un banal fait divers.

 

Dans tous les cas, nous sommes pour que la justice soit rendue et que tous les auteurs de délits, policiers tout comme jeunes soient redevables de leurs actes et passibles de condamnations qui les incitent à réfléchir sur les actes de violence qu’ils ont commis. Qu’ils aillent en prison, car dans ce pays c’est le seul moyen que l’on ait trouvé pour faire réfléchir les auteurs de délits. Et dans le cas des policiers de Grasse pour réfléchir à leur indispensable reclassement professionnel car contrairement à Hakim, à leur victime, ils ont, eux, toujours la possibilité d’envisager leur avenir.

 

La police doit faire respecter les lois, on n’a jamais mis en question cette mission mais nous voulons des policiers qui soient exemplaires. Les policiers, s’ils veulent faire respecter les lois par les jeunes doivent d’abord apprendre à les respecter eux-mêmes et donner l’exemple. Un comportement en rupture avec les agissements des policiers de la BAC (Brigade Anti-Criminalité) qui, suivant des sociologues comme Mathieu Rigouste, représentent un bras armé pour maintenir l’ordre, l’ordre des possédants, et à qui on enseigne comment se comporter pour faire régner un climat de peur. Si on est libre dans ce pays, ces libertés, on commence à les perdre.

La justice également doit être exemplaire, et lorsqu’il est reconnu que les policiers ont outrepassé les lois ou les règlements, ont manqué lourdement à leurs devoirs ou à leurs missions, elle se doit de les condamner avec toute la rigueur qu’elle met à sanctionner les autres citoyens. N’importe quelle personne qui, en France, se rend coupable d’un manquement grave dans son travail se voit sanctionnée ou virée. Il serait incompréhensible que les policiers responsables de la mort d’Hakim se voient maintenus dans leurs fonctions.

Dans le cas présent, si les responsables de la mort d’Hakim se trouvent en correctionnelle - de notre côté, on a bien voulu admettre qu’il ait pu y avoir mort par imprudence, homicide involontaire-, mais dans des cas pareils, la peine peut aller jusqu’à trois ans, sans compter l’amende à définir par le tribunal, les réquisitions en sont très loin.

Dans le cas de Hakim, on est face à des policiers qui n’ont pas porté assistance à une personne en danger, et face de surcroît à un acharnement injustifié qui a provoqué la mort de Hakim. On se trouve donc face à deux chefs d’inculpation : homicide involontaire et /ou non-assistance à personne en danger.

Au cours du procès, on a entendu des témoignages accablants, l’expertise médicale a été sans équivoque, et si le procureur a prononcé un réquisitoire incendiaire, traitant les policiers d’inhumains, leur reprochant d’avoir failli à leurs obligations, c’est en définitive pour ne demander que des peines allant de six à dix-huit mois avec sursis. Ce qui laisse entendre qu’un policier n’est pas justiciable comme tout autre citoyen.

Pour nous, il est incompréhensible que la justice puisse protéger des personnes qui font honte à la police. Nous ne pouvons accepter que la justice grassoise, -française plus généralement parce que de tels agissements se passent partout en France- garantisse l’impunité et maintienne en place des agents qui dénaturent le rôle de la police. C’est irresponsable cela ne peut qu’entraîner une perte de confiance qui serait préjudiciable pour tous et pour la cohésion sociale à laquelle une justice «  juste » doit contribuer.

Quant à nous, nous devons rester unis pour continuer à mener ce combat, et à réclamer la justice dignement comme la famille Ajimi, continuer le combat pour ne plus être les boucs émissaires, continuer le combat pour Hakim mais aussi pour tous les cas similaires, continuer le combat pour la justice que l’on porte tous au plus profond de nous, continuer le combat pour amener la justice à faire son travail et si elle rechigne à le faire, la pousser à assumer ses responsabilités.

Dans ce pays où l’on vit dans un Etat de droit, on n’a qu’une seule revendication, que la justice applique le droit, un même droit pour tous.

Tant qu’il n’y aura pas de justice, il n’y aura pas de paix.


Photo : Walid et le père de Hakim.

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