Côte d'Ivoire : retour sur les points de vue de 2002.
13 Avril 2011 , Rédigé par Repères antiracistes Publié dans #Afrique, #Côte d'Ivoire
Publié avec le souci de la vérité historique. A l'époque, les forces "nordistes" étaient suspectes aux yeux des organisations progressistes.
Survie, qu'on ne peut pas accuser de complaisance pour la Françafrique, s'explique sur sa position deux ans après :
(..) En 2002 ont été déclenchés un coup d’État puis une rébellion, correspondant certes à des problèmes réels de citoyenneté et d’accès à la terre, mais manifestement soutenus par les réseaux de la droite françafricaine et leur relais local, le dictateur burkinabè Blaise Compaoré, qui élimina en 1987 Thomas Sankara avec l’aide d’Houphouët et de Jacques Foccart, conseiller du Premier ministre français d’alors, Jacques Chirac. Rappelons que ce dernier est depuis trente ans parrain de la Françafrique. Devant les risques de pogroms suscités par cette guerre civile et l’absence d’alternative immédiate, Survie et de nombreuses associations françaises ont appelé en 2002 à ce que les troupes françaises stationnées sur place (le 43e BIMa) s’interposent en attendant une intervention des Nations unies (..)
http://survie.org/francafrique/cote-d-ivoire/article/fermer-les-bases-militaires-de-la
APPEL URGENT : Côte d'Ivoire : prévenir le pire
Publié le jeudi 12 décembre, 2002
En Côte d'Ivoire, dans un contexte d'instrumentalisation de la xénophobie (« l'ivoirité »), sur fond de crise économique provoquée par un pillage multiforme (interne et externe), une rébellion armée a précipité la radicalisation des stratégies politiques. Cette radicalisation mise sur des clivages Nord-Sud et/ou Islam-Christianisme, qu'elle provoque puis avive. Les Ivoiriens sont sommés de s'enrôler dans un camp ethnique ou religieux. Les "tièdes" sont soupçonnés de trahison. À Abidjan, les faucons du régime, apparemment en position dominante, fourbissent une arme aux effets incalculables, "expérimentée" à grande échelle en 1994 au Rwanda : cultiver l'hystérie par les médias de la haine, enrôler la jeunesse dans des mouvements susceptibles de se muer en milices d'"autodéfense", avec l'appoint d'"escadrons de la mort". Dans le Nord, des informations crédibles ont fait état d'exécutions extrajudiciaires de fonctionnaires "loyalistes". Les extrémistes de chaque faction rêvent d'imposer militairement leur suprématie, rompant une trêve fragile dès lors que faiblirait la volonté d'interposition de la communauté internationale - représentée principalement, de facto, par les pays ouest-africains et la France. Le monde se souvient, ou devrait davantage se souvenir, de l'horreur de 1994 au Rwanda, quand un mélange de haine, de peur et de contrainte a enrôlé plus d'un million de personnes dans le massacre d'environ 800 000 autres, leurs voisins. Il n'est pas possible que l'humanité accepte ce risque pour la Côte d'Ivoire, même à une échelle moindre. Un embrasement de la guerre civile ferait courir le risque d'innombrables pogromes, et d'un engrenage mimétique des atrocités. Les organisations et les personnalités soussignées décident de coaliser leurs volontés pour tenter d'épargner le pire. Elles demandent que le Conseil de sécurité des Nations unies soit saisi au plus tôt, par les Etats qui en ont le pouvoir, pour :
condamner avec la plus grande fermeté toute tentative de relance des hostilités, la crise actuelle n'ayant d'issue possible que politique, en particulier sur les questions de citoyenneté, de démocratie et de justice ;
décréter un embargo sur les livraisons d'armes, interdire l'emploi de mercenaires, condamner le recrutement d'enfants-soldats, lancer une enquête sur le financement et l'armement des rébellions ;
exiger la fermeture immédiate des médias de la haine ;
menacer de déférer les propagandistes de l'ethnisme, les recruteurs de milices, les commanditaires d'escadrons de la mort et les autorités qui les tolèrent devant la Cour pénale internationale. La France, par l'étroitesse de ses relations avec la Côte d'Ivoire, a une responsabilité toute particulière. Elle dispose de nombreux moyens, y compris la saisine du Conseil de sécurité, pour enrayer l'engrenage mortifère. C'est une question de volonté et de priorité politiques. Se trouvant de fait au cœur du processus d'interposition, elle ne peut le déserter tant que n'est pas mis en place un dispositif suffisant pour empêcher un drame qui peut encore être évité. Elle ne peut rééditer le départ précipité des troupes de son opération Amaryllis, en avril 1994 au Rwanda - contribuant alors à abandonner toute une population au déferlement génocidaire. Les organisations et personnalités soussignées s'engagent et invitent à soutenir toutes les expressions d'un langage de paix, de citoyenneté et de dialogue en Côte d'Ivoire. Elles encouragent les Ivoiriens à propager un message de résistance à la logique du clivage ethnique et religieux, à l'enrôlement des civils dans une guerre fratricide (certains le font déjà, avec beaucoup de courage, sans recevoir un écho suffisant). Elles invitent à la diffusion d'un slogan du genre : « La haine ne passera pas par moi ». Chaque Ivoirien, personnellement et dans ses multiples formes de relations sociales, peut contribuer à désamorcer cette arme, à l'exemple des responsables des différentes communautés de Bouaké qui ont brisé le cycle de représailles en instaurant des groupes de vigilance conjointe.
Premiers signataires : Associations : Afrique Verte, Agir Ensemble pour les Droits de l'Homme, Agir ici, Aircrige, Antenne Foi et Justice Afrique-Europe de Paris, ATTAC, CADTM-France, CCFD, Cedetim, Cimade, Centre de Recherche et d'Information pour le Développement (CRID), Coordination Sud, Fédération Artisans du Monde, Fédération Peuples Solidaires, FIDH, Frères des Hommes, Ligue des Droits de l'Homme, MRAP, Oxfam-Solidarité (Belgique), Prévention Génocides, Ritimo, Scouts de France, Survie, Terre des Hommes France.
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