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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

« Les coupables, ce sont les victimes », par Eric Fassin

9 Avril 2021 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Racisme, #Antiracisme politique

« Les coupables, ce sont les victimes », par Eric Fassin

TRIBUNE. Qu’est-ce que le racisme ? C’est une discrimination systémique, à laquelle participent les institutions étatiques, explique le sociologue. Mais une définition inversée est en train de s’imposer : le racisme serait d’abord le fait des antiracistes, et même des personnes racisées.

Naguère, en matière de racisme, les choses semblaient simples : il y avait en France, disons depuis les années 1960, avec la décolonisation et le reflux de l’extrême droite, un consensus apparent pour rejeter le racisme. Bien sûr, en 1983, il y eut d’un côté la Marche pour l’égalité et contre le racisme, de l’autre les premiers succès du Front national. Mais c’était aussi le moment où revenait en force, dans le débat public, la figure de la République universaliste. Ainsi, l’exception raciste semblait encore confirmer la règle antiraciste.

À l’époque, tant le racisme que l’antiracisme étaient définis comme des idéologies. En conséquence, il suffisait de répudier le racisme pour en être exonéré ; mais pour en être accusé, il fallait le revendiquer. Autant dire que le racisme, c’était l’autre. D’ailleurs, pour mieux le tenir à distance, on l’attribuait volontiers aux classes populaires : les élites éclairées s’en croyaient exemptes. Le racisme, pensaient-elles, n’était qu’un résidu idéologique dû à l’ignorance. Les lumières de la raison devaient pouvoir dissiper cette obscurité.

Racisme systémique

Depuis les années 1990, il est devenu de plus en plus difficile de se contenter d’une telle conception. En effet, le racisme n’a rien de résiduel. Au contraire, il pèse de plus en plus sur les minorités. Ce n’est pas seulement l’insulte ou l’agression ; ce sont aussi, et peut-être surtout, les mécanismes insidieux de la discrimination raciale, en particulier dans l’accès à l’emploi ou au logement, ainsi que dans les rapports avec la police. Cette prise de conscience a entraîné une nouvelle approche du racisme, moins idéologique que sociologique. Il s’agit, non seulement d’individus racistes, mais de mécanismes sociaux structurels : c’est ainsi qu’on parle de « racisme systémique ».

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