La mémoire sélective de Valérie Boyer
1 Juillet 2020 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Proche et Moyen-Orient, #Génocides, #Arménie
La mémoire sélective de Valérie Boyer
Réflexions sur une instrumentalisation
À l’heure où fait rage la guerre des mémoires, à l’heure aussi où la droite vacille à Marseille, à l’heure enfin où la France rayonne plus que jamais grâce aux génies littéraires que sont Eric Zemmour, Alain Finkielkraut, Michel Onfray ou Renaud Camus, un hommage s’impose à une personnalité politique qui ne ménage pas ses efforts pour apporter sa pierre à l’édifice de « l’exception française ». La députée de la huitième circonscription des Bouches-du-Rhône n’a jamais manqué l’occasion d’invoquer la grandeur de la France et de ses valeurs ancestrales. Récemment épinglée pour sa curieuse lecture des sondages, elle s’illustre aussi par un rapport plus que douteux à l’histoire : de Soliman le Magnifique au génocide des Arméniens, sa vision du passé reflète une défense à géométrie variable des minorités persécutées.
Députée de la huitième circonscription des Bouches-du-Rhône, Valérie Boyer avait fait partie en 2017 du dernier cercle d’irréductibles à soutenir François Fillon, mais, habile et déterminée, elle ne l’a pas suivi dans sa chute, puisqu’elle a réussi à se faire réélire au Parlement. Pour avoir su tenir ses positions et conserver son fief, elle a été nommée secrétaire générale adjointe du parti par son président Laurent Wauquiez, qui a vu en elle l’étoile montante de cette droite catholique en pleine résurrection.
Une « charité » bien ordonnée...
Un catholicisme profondément réactionnaire, mais aussi identitaire. Proche de la Manif pour tous, Valérie Boyer a, jusqu’à cette année, manifesté une hostilité prononcée à l’encontre des droits des gays et des lesbiennes, s’insurgeant encore il y a peu contre le remboursement de la PMA si toutes les femmes (comprenez : même les lesbiennes) pouvaient y avoir accès. La députée semble surtout réserver sa charité chrétienne… aux Chrétiens, n’hésitant pas pour cela à remonter les siècles, à se placer sous les patronages prestigieux de François Ier et Soliman le Magnifique, dont l’alliance aurait permis la sécurité des Chrétiens d’Orient [1], et même à s’inscrire dans leur sillage [2].
De cet amour du prochain qui est loin d’être universel témoigne aussi l’hostilité de Valérie Boyer à l’égard de la Turquie et des Turcs, qui constituent selon elle une menace directe pour l’Europe. Dans un discours lyrique prononcé au Parlement en juin 2016, elle avait fait part de son effroi devant la perspective d’une suppression des visas pour les ressortissants turcs dans le cadre d’un accord avec l’Union Européenne. Celui-ci contraignait en retour la Turquie, qui compte sur son sol plus de quatre millions de réfugiés, à empêcher ces derniers de traverser la mer Egée pour rejoindre l’Europe :
« 79 millions de Turcs (!) pourront librement circuler dans l’espace Schengen comme de véritables citoyens sans en être membres, c’est un marché de dupe ! » [3]
On devine son soulagement lorsque le projet a finalement été abandonné. La députée avait, dans le même discours, reproché au président turc de vouloir « réislamiser » son pays [4]. Un reproche assez confus, et surtout pas forcément le plus pertinent : même si la propagande d’Erdogan mobilise la dimension religieuse, le régime a plutôt glissé, en particulier depuis trois ans, vers la tyrannie nationaliste davantage que vers la dictature théocratique.
Notons d’ailleurs, ici, un curieux deux poids deux mesures dans l’appréciation des dérives et crimes d’État puisque Valérie Boyer réserve au « boucher de Damas », Bachar al-Assad, une indulgence voire un soutien qui l’ont conduit à se rendre plusieurs fois en Syrie [5].
Quoiqu’il en soit, le choix du verbe « islamiser », comme la notion d’« islamisation », directement importée du vocabulaire de l’extrême-droite, n’est pas anodin. Il dit l’obsession de Valérie Boyer pour les musulmans, les musulmanes… et leur voile, décrit par exemple, en 2016, comme un « signe d’allégeance à notre ennemi » : comprendre le terrorisme d’inspiration « salafiste ». La députée est même allée jusqu’à préconiser ni plus ni moins que « mettre un terme » au port du foulard !
Un devoir de mémoire à géométrie variable
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Députée de la huitième circonscription des Bouches-du-Rhône, Valérie Boyer avait fait partie en 2017 du dernier cercle d'irréductibles à soutenir François Fillon, mais, habile et détermin...
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