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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Hommages à Zeev Sternhell (1935-2020)

22 Juin 2020 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Israël et le sionisme, #Extrême-droite

Zeev Sternhell (1935-2020): mort d’un juste

Zeev Sternhell était un survivant du génocide nazi, un vétéran des guerres d’Israël, un historien spécialiste du fascisme et un combattant de la paix avec les Palestiniens. Depuis quelques années, il ne cessait de mettre en garde ses compatriotes sur la fin de la démocratie en Israël.

Zeev Sternhell est mort dimanche à Jérusalem des suites d’une opération chirurgicale. Avec lui s’éteint l’une des dernières voix de la raison dans un pays en proie aux passions, aux terreurs et aux attentes les plus funestes. Une voix douce, teintée, en français, d’un léger accent provençal, héritage de son enfance, exprimant des convictions fermes qui ne redoutaient ni l’adversité ni la controverse. Sa vie d’homme, de soldat, d’universitaire, de militant, ne lui a épargné, il est vrai, ni l’une ni l’autre.

Né en 1935, à Przemyśl, en Pologne, une petite ville dont un tiers des habitants sont juifs, il a quatre ans lorsque le pays est plongé dans l’occupation soviétique puis allemande. Son père, mobilisé dans l’armée polonaise, meurt tout au début de la guerre. Sa mère et sa sœur mourront au camp d’extermination de Belzec. C’est un oncle qui l’arrache au ghetto et le sauve en l’emmenant à Lwów, où il partage la clandestinité et les périls d’autres survivants juifs qui se font passer pour des réfugiés catholiques.

En 1946, sa tante réussit à le faire intégrer à un convoi de regroupement familial en direction de la France où il est accueilli par un autre oncle, ancien résistant, à Avignon. Après cinq ans dans un lycée d’Avignon, puis dans un internat de Valence où il apprend le français et se passionne déjà pour la politique, il décide d’émigrer dans le jeune État d’Israël, qui vient de naître. Il a 16 ans. « La guerre d’indépendance à déclenché ma volonté de partir, racontera-t-il. Ma décision découlait de l’histoire sioniste de ma famille et de mon désir de prendre part à la construction de l’État des Juifs. »

Il arrivera trop tard pour participer à la guerre d’indépendance mais prend part, de 1956, dans le Sinaï, à 1982, au Liban, à quatre des guerres d’Israël. D’abord comme commandant d’un peloton de la brigade Golani, puis comme officier dans des régiments de chars. Mais ce n’est pas dans l’armée qu’il entend faire carrière. Il a décidé de devenir historien. 

Lire la suite de l'article de René Backmann

Zeev Sternhell, l’historien qui secoua la France comme un prunier fasciste (Antoine Perraud)

Disparu ce 21 juin à 85 ans, l'historien israélien Zeev Sternhell était devenu la bête noire des études historiques officielles françaises, après la parution, en 1983, de son Ni droite ni gauche. L’idéologie fasciste en France.

Sa vie fut un roman, entamé en avril 1935 à Przemyśl, bourgade galicienne et en partie yiddishophone, nichée entre Cracovie et Lwów (aujourd’hui Lviv, en Ukraine). Lwów, où l’enfant de 7 ans fut caché, échappant à la destruction des Juifs d’Europe, avant d’être recueilli en France au lendemain de la guerre, puis en Israël. Historien devenu, Zeev Sternhell devait, sur la demande du Negus Haïlé Sélassié, diriger l’université d’Addis-Abeba, que le roi des rois entendait voir rayonner en Éthiopie. De retour en Israël, Sternhell allait finir sa carrière en occupant la chaire Léon Blum de sciences politiques à l’université hébraïque de Jérusalem.

La chronique a retenu une image faussée de ce personnage, doux mais que sa surdité faisait parler fort, scrupuleux et fidèle en amitié – en particulier avec l’ancien directeur de France Culture Jean-Marie Borzeix. Dans la (dé)mesure où ses recherches, sans concession, dérangeaient, on en a fait un boutefeu extrêmement dangereux. Rien n’est plus faux. Zeev Sternhell avait purement et simplement osé prendre l’exception française par le mauvais bout. Non pas celui de la patrie des droits de l’homme apportant les Lumières et la démocratie au monde enténébré, mais celui des passions détestables ensauvageant l’Occident après avoir fait ses classes dans les colonies : le fascisme à la française.

 

Pour notre historien, la convergence, au cours des années 1885-1914, entre nationalisme intransigeant et syndicalisme révolutionnaire a produit une synthèse aussi originale qu’explosive : anti-Lumières et anti-démocratique.

En 1983, son Ni droite ni gauche. L’idéologie fasciste en France causa indirectement la mort de Raymond Aron, qui s’effondra, après être allé, au nom d’une certaine idée de la concorde nationale, témoigner au Palais de justice en faveur de son ami Bertrand de Jouvenel (1903-1987). Celui-ci avait intenté un procès à l’historien israélien. Sternhell exposait pourtant la vérité : Jouvenel s’était fait l’agent d’influence du nazisme en interviewant Hitler, sans le moindre recul critique, en 1936, vantant la « bonhomie nazie », assurant que le chancelier du IIIe Reich prônait une « politique extérieure toute tendue vers l’amitié avec la France », en homme « simple, qui parle doucement, raisonnablement, gentiment, avec humour ».

Jouvenel avait été membre du PPF de Jacques Doriot et avait publié, en 1941, un livre au titre étonnamment contemporain, près de 80 ans plus tard : La Décomposition de l’Europe libérale. Et ce, grâce aux libéralités de son cher ami Otto Abetz, ambassadeur de l’Allemagne hitlérienne à Paris – après avoir soudoyé l’intelligence française lors de la montée des périls.

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