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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Bye-bye le droit de vote ? No way ! J'y suis, j'y vote ! par (Mogniss H. Abdallah)

2 Février 2020 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Étrangers et immigrés

Bye-bye le droit de vote ? No way !  J'y suis, j'y vote !  par (Mogniss H. Abdallah)

Ainsi donc, le Brexit devenant effectif au 31 janvier 2020, les résidents britanniques en France perdent leur droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et européennes, et ce dès le 1er février. L'annonce, laconique, émane du ministère de l'intérieur français, comme en écho à sa réponse froide et technocratique à une question à ce sujet au Sénat en septembre 2019 : « Ils seront radiés d'office par l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) en application du III, 2°, de l'article L. 16 du code électoral qui dispose que l'Insee radie « les électeurs qui n'ont plus le droit de vote » (JO Sénat du 05/09/2019 - page 4543). »

 Quelque 46 000 électeurs vont ainsi être radiés, et environ 800 conseillers municipaux de nationalité britannique élus en 2014 ne pourront plus se représenter, à moins d'avoir acquis entre temps la nationalité française. S'ils sont en France depuis plus de quinze ans, ils n'auront pas non plus le droit de vote aux élections en Grande-Bretagne, devenant ainsi une sorte d' « apatrides politiques ».

   Cette inqualifiable régression des droits politiques, bien que déjà limités pour les citoyens européens (qui restent en France exclus de toute éligibilité touchant à la « souveraineté nationale »), n'aurait pas eu lieu d'être si tous les résidents étrangers en France avaient le droit de vote et d'éligibilité en France. Cause perdue, radotage, du « déjà-vu », se renfrognent certains militants associatifs blasés qui ne croient plus à cette promesse oubliée de Mitterrand en 1981 et de Hollande en 2012 – alors même que celui-ci disposait d'une majorité au Parlement et au Sénat pour faire passer une loi en ce sens par un vote recueillant 3/5ème des suffrages des deux assemblées au congrès de Versailles (avec l'apport nécessaire d'élus centristes) -. Ils laissent ainsi le champ libre à ceux qui à force d'élucubrations s'imaginent que le droit de vote favoriserait « repli sur soi » et « listes communautaristes » (sic!), et à ceux qui proclament, à l'instar aujourd'hui d'Emmanuel Macron : « y a qu'à » prendre la nationalité française. Tout en négligeant le fait que l'acquisition de celle-ci n'est pas un droit « automatique », et que les refus de naturalisation, malgré les discours officiels sur une facilitation supposée, sont en hausse sur la période 2017 - 2018. Un décret passé le 30 décembre 2019 durcit d'ailleurs cette acquisition en rehaussant le niveau exigé de maîtrise de la langue française. Sans oublier l'exigence de « ressources stables et suffisantes », laissant entendre que les précaires ne seraient pas dignes, ou en capacité de devenir Français.

Pour une Citoyenneté de résidence

   Le Collectif J'y suis, J'y vote, qui regroupe plusieurs dizaines d'associations, syndicats et partis, entend pour sa part relancer son action « Pour une Citoyenneté de résidence » à l'occasion des municipales de mars 2020. Depuis le début des années 1990, il remet inlassablement sur le tapis des campagnes « pour le droit de vote et d'éligibilité de tous les résidents étrangers », organise des « votations citoyennes » et se coordonne avec des initiatives européennes similaires. Pas question de se laisser gagner par la démobilisation ambiante sur cet enjeu. Il l'a encore répété lors d'une rencontre-débat à Paris le 25 janvier 2020 avec Saïd Bouamama (FUIQP*), Alain Esmery (LDH*), Tarek Toukabri (ADTF*) et Bernard Delemotte* dans les locaux de la FTCR*. Saïd Bouamama y a estimé que la situation est aujourd'hui propice, en évoquant l'impact considérable de la revendication des Gilets Jaunes pour un Référendum d'initiative citoyenne (RIC). Comme le souligne le collectif, « la citoyenneté ne se limite pas à une élection tous les six ans. De plus en plus souvent, entre deux scrutins, pour des projets d’aménagement, des budgets participatifs…, des communes sollicitent la participation de tous les habitants, étrangers comme Français : consultations citoyennes, référendums locaux… »

   Mohamed Ben Saïd*, toujours aussi pragmatique, présente pour sa part la réédition prévue d'un vote symbolique des résidents étrangers, y compris des sans-papiers pouvant justifier d'un document de résidence, dans plusieurs villes : la FTCR mettra ainsi en place des urnes dans ses locaux parisiens du lundi 9 mars au 15 mars inclus, il en ira de même par exemple à Amiens, à Bagnolet et ailleurs. Les votants devront s'exprimer sur leur choix portant sur une offre de candidatures identique à celle soumise aux électeurs et électrices français. Les résultats seront eux communiqués au soir du 15 mars, 1er tour des élections municipales.

 
62% des Français se déclarent favorables à l’extension du droit de vote aux étrangers non-membres de l’Union Européenne,
selon le dernier sondage Harris-Interactive (janvier 2020)

   Pour se donner du coeur à l'ouvrage, Bernard Delemotte annonce la sortie prochaine du dernier sondage Harris – Interactive pour La Lettre de la Citoyenneté.* Cette enquête intitulée « Le regard des Français sur le droit de vote des résidents étrangers aux élections locales », réalisée au téléphone du 16 au 18 janvier 2020 sur un échantillon de 1024 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, révèle une évolution encourageante : « une fois informés que les étrangers des pays de l’Union Européenne résidant en France ont le droit de vote aux élections municipales et européennes, 62% des Français se déclarent favorables à l’extension de ce droit aux étrangers non-membres de l’Union Européenne vivant dans le pays. » . Les femmes y apparaissent davantage favorables que les hommes (respectivement  à 67% et à 58Ù, soit + 7% et +2% par rapport à la précédente enquête de 2018). Et on dit que les jeunes se désintéressent de la question. Pourtant, ils sont les plus nombreux à y répondre favorablement (entre 74 et 75%, respectivement dans les classes d'âge 18-24 ans et 25-34 ans). Même la moitié des séniors (65 ans et plus) se déclarent en faveur du droit de vote (50%, + 5%). Peut-être une conséquence du regain de combativité des retraités dans le mouvement social actuel ? 

En tout cas, les Français n’ont jamais été aussi peu nombreux à être défavorables au droit de vote des étrangers (34%, -13 points par rapport à 2015). Certes, l'obtention de ce droit ne semble pas une préoccupation première, et peu paraître un objectif trop lointain, mais l'adhésion massive à son principe des différentes formations de gauche et écologistes (entre 80 et 88 %, + 8 à + 15 %) invite à une remobilisation immédiate, à envisager un avenir possible : et pourquoi pas, comme le suggère Bernard Delemotte, pousser pour l'organisation d'un référendum national ?

Mogniss H. Abdallah

agence IM'média

31 janvier 2020

* Enquête Harris Interactive pour La Lettre de la Citoyenneté :

- Une vidéo de l'agence IM'média (2002 - 2011), propose un décryptage ce type de sondage plutôt optimiste quant à l'évolution de l'opinion sur le droit de vote des résidents étrangers :

https://www.youtube.com/watch?v=bvIMiD9TuGU&fbclid=IwAR1g5Y0sFhvQFdqqgbi5HPaVL8UOZA6TGxapfcfGbKhanOz1BlH_R6u5VPI

*ADTF : Association Démocratique des Tunisiens en France

*Bernard Delemotte : Association de soutien à l'expression des communautés d'Amiens

*FTCR : Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des Deux rives

*FUIQP : Front uni des immigrations et des quartiers populaires

* La Lettre de la Citoyenneté : http://www.lettredelacitoyennete.org/index.html

*LDH : Ligue des droits de l'homme

*UTAC : Union des Tunisiens pour l'action citoyenne

Collectif « J’y suis, j’y vote » C/O UTAC – BL 47 – Maison de la Vie Associative et Citoyenne – 22 rue Deparcieux - Paris 75014.

 

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