Sur l’immigration, la gauche n’a plus les mots (Pierre Jacquemain)
14 Août 2018 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Étrangers et immigrés, #Politique française
Luttant mollement contre la désignation des migrants comme boucs émissaires et la définition de l’immigration comme "problème", les partis de gauche semblent avoir renoncé à imposer un autre discours sur la question.
Article extrait du dernier trimestriel de printemps de Regards.
Lors de la manifestation du 21 février 2018 – la première unitaire depuis 2015 sur le sujet – seuls les associations et collectifs appelaient à se rassembler pour dénoncer le projet de loi "Asile et immigration". Parmi les participants, plusieurs centaines de personnes, avocats, agents de l’État du secteur de l’asile et associations d’aide aux migrants. Quelques élus, élus locaux ou députés communistes et insoumis, y ont participé mais leur présence est restée marginale. Parce que dans les faits, à part sur quelques plateaux de télés et de radios pour dénoncer mécaniquement "la politique du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb", il n’y a pas grand monde pour promouvoir une politique d’accueil ambitieuse et volontariste.
La bataille culturelle abandonnée
Aujourd’hui, c’est la France insoumise qui donne le la, à gauche. Et lorsqu’on observe les grandes campagnes nationales retenues par ses militants pour l’année 2018, aucune parmi les trois choisies ne concerne les droits des étrangers. Et pourtant, alors que la "crise migratoire" s’intensifie en Europe et que l’année 2018 – notamment par l’agenda politique engagé par Emmanuel Macron et cette loi "Asile et immigration" – va sans doute marquer un tournant sans précédent de la politique d’accueil en France, une mobilisation politique, intellectuelle, syndicale, de l’ensemble de la gauche aurait été nécessaire.
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Comme si la gauche avait abandonné la bataille culturelle. La bataille des idées. Celle des convictions. De la pédagogie, à travers de larges campagnes. Ne serait-ce que pour contrer à l’échelle nationale le discours ambiant qui, de l’actuelle majorité en passant par la droite de Laurent Wauquiez et l’extrême droite de Marine Le Pen, ne cesse de répandre des préjugés les plus nauséabonds. Ainsi, comme le relevait Héloïse Mary, présidente du BAAM (Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants) dans La Midinale du 21 février dernier : « La gauche a perdu une grande partie de son influence sur les questions migratoires par peur du Front national et de sa faiblesse idéologique […]. Elle est prise au piège de l’opinion publique. »
L’opinion publique. Sans doute a-t-elle été un élément déterminant dans l’évolution de la réflexion, à gauche. À commencer par celle de Jean-Luc Mélenchon, dont le discours a évolué au cours de ces quelques dernières années. Ou plutôt depuis la campagne électorale de 2012. Lors de son discours très remarqué à Marseille, devant près de 100 000 personnes sur la plage du Prado, le héros de la gauche avait alors tenu un discours qui faisait honneur à la tradition humaniste, celles des droits et de l’accueil, en France. Ainsi avait-on vanté son « ode à la Méditerranée et au métissage » : « Marseille est la plus française des villes de notre République. Ici, il y a 2 600 ans, une femme a fait le choix de prendre pour époux l’immigré qui descendait d’un bateau, c’était un Grec et de ce couple est née Marseille […]. Les peuples du Maghreb sont nos frères et nos sœurs. Il n’y a pas d’avenir pour la France sans les Arabes et les Berbères du Maghreb. » Or, quelques jours après avoir tenu ce discours, les sondages pointaient un recul net de deux à trois points du candidat de feu le Front de gauche.
Rien ne dit que la coïncidence du discours et de l’évolution sondagière recelait un lien de cause à effet. Mais c’est ainsi qu’elle a été – bien imprudemment – interprétée. Et si, depuis, le quatrième homme de la présidentielle de 2018 n’a pas véritablement changé de discours sur le fond – les propositions politiques sont sensiblement les mêmes entre la présidentielle de 2012 et celle de 2018 –, sur la forme, la démonstration qu’en fait désormais Jean-Luc Mélenchon, a largement évolué. En 2012, alors que dans le programme du Front de gauche « l’immigration n’est pas un problème », il convient aujourd’hui, selon celui de L’Avenir en commun, de « lutter contre les causes des migrations ».
Changement de discours
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Sur l'immigration, la gauche n'a plus les mots
Lors de la manifestation du 21 février 2018 - la première unitaire depuis 2015 sur le sujet - seuls les associations et collectifs appelaient à se rassembler pour dénoncer le projet de loi "Asi...
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