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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Enzo Traverso « L’extrême droite reprend les codes de l’antisémitisme des années 1930 »

25 Février 2017 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Extrême-droite, #Front national, #Antisémitisme et négationnisme, #Islamophobie

Dans les Nouveaux Visages du fascisme (1), l’historien analyse les mutations des mouvements d’extrême droite européens issus « de la matrice fasciste ». Selon lui, la gauche doit « redonner des perspectives politiques » pour occuper « l’immense vide » entre le « post-fascisme », qui met au ban des musulmans, et le djihadisme.

Les mouvements d’extrême droite européens (l’AfD en Allemagne, le Front national en France, le Jöbbik en Hongrie…) reprennent-ils des codes du fascisme ou du nazisme ?

Enzo Traverso D’abord, ils partagent des traits communs, notamment le rejet de l’Union européenne, la xénophobie, le racisme, en particulier dans sa dimension islamophobe. Au-delà de ces marqueurs, on constate des différences notables. Il y a des mouvements clairement néofascistes ou néonazis : l’Aube dorée en Grèce, le Jöbbik en Hongrie, etc., dont la radicalité est souvent liée à l’ampleur de la crise, même si en Grèce la montée de Syriza a grippé cette dynamique. En France, le Front national a une matrice fasciste. Il y a certes des néofascistes dans le parti, mais son discours n’est plus fasciste, car il a fait un effort considérable de mutation idéologique qui est une des clés de son succès. S’il tenait encore des propos néofascistes, il ne serait pas audible et ne pourrait certes pas espérer arriver au second tour de l’élection présidentielle.

Ces partis « de matrice fasciste », pourquoi les appeler post-fascistes et pas néofascistes ? Par quoi caractérisez-vous ce post-fascisme ?

Enzo Traverso C’est une catégorie transitoire. Le post-fascisme est un concept qui tente de saisir ce processus de mutation en cours : le FN n’est plus un mouvement fasciste, mais il reste un mouvement d’extrême droite, xénophobe, qui n’a pas encore rompu le cordon ombilical qui le lie à sa matrice fasciste. On ne sait pas ce que ça va donner. Cela pourrait déboucher, en cas de décomposition de l’Union européenne, d’approfondissement de la crise économique, sur sa transformation en alternative clairement fasciste, cela s’est vu par le passé. Ou prendre des caractéristiques nouvelles, s’intégrer dans le système, comme le Mouvement social italien dans les années 1990, qui est devenu une composante de la droite traditionnelle. Le processus est ouvert, car dans cette mouvance que je qualifie de post-fasciste il y a également des mouvements politiques nés ces dernières années qui n’ont pas d’origines fascistes, comme Ukip en Angleterre ou la Lega Nord en Italie, bien qu’ils convergent : Salvini ou Farage ont de bonnes relations avec le Front national. Cette notion ne vise ni à sous-estimer le danger, ni à le rendre plus acceptable, mais à le comprendre si on veut le combattre efficacement.

L’islamophobie a remplacé l’antisémitisme comme préoccupation majeure de l’extrême droite, française notamment, même si l’antisémitisme militant n’a pas disparu.

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