Motion des 6èmes rencontres des luttes des immigrations et des quartiers populaires
Les sixièmes Rencontres nationales des immigrations et des quartiers populaires se sont tenues à Libercourt dans le Pas-de-Calais les 21 et 22 mai 2016. Après avoir analysé la situation actuelle des quartiers populaires et des immigrations, les Rencontres ont adopté la motion suivante :
Considérant
1. La poursuite et l’intensification depuis nos dernières rencontres des guerres coloniales visant à la balkanisation des nations afin de garder le contrôle des sources d’hydrocarbures et de minerais stratégiques. Après l’Afghanistan, l’Irak, la Somalie, le Soudan, etc., la Syrie est l’objet de la même stratégie. Les interventions militaires en Afrique se succèdent également avec le même danger de faire « éclater pour mieux contrôler ».
2. Que pour faire éclater une nation les puissances impérialistes n’hésitent plus à instrumentaliser les différences religieuses et culturelles et à détruire violemment les infrastructures vitales, c’est-à-dire les bases de la société. Ce sont ces guerres de destruction totale du vital qui créent les conditions pour qu’apparaissent des groupes ultraréactionnaires se masquant derrière la religion pour imposer leur pouvoir. Les décideurs occidentaux des guerres sont de ce fait en alliance objective avec ces groupes.
3. Que ces guerres et le contexte invivable qu’elles produisent poussent un nombre grandissant d’hommes, de femmes et d’enfants à prendre le chemin de l’exil. L’horreur produite par ces guerres mène à des prises de risque de plus en plus grandes pour tenter de survivre. A ces guerres s’ajoute l’intensification du néocolonialisme qui plonge dans la misère des millions de personnes. Les Accords de Partenariat Économique (APE) que l’Union Européenne veut imposer aux pays d’Afrique, du Pacifique et des Caraïbes en sont un exemple significatif. Ces accords rendent obligatoire la libéralisation totale du commerce et la fin de toute mesure de protection. Ce sont des dizaines de millions de petits paysans que l’on sacrifie ainsi sous l’autel des grandes multinationales agro-alimentaires européennes. Pour eux aussi l’exil -quels que soient les dangers- risque d’être au rendez-vous.
4. Que la seule réponse offerte par les puissances guerrières et productrices de misère massive est la fermeture des frontières au prétexte qu’on ne pourrait pas « accueillir toute la misère du monde ». A cet égard l’accord signé avec la Turquie autorisant un refoulement massif des réfugiés n’est rien d’autre qu’une déportation de masse légalisée. C’est pourquoi l’accueil des tous les réfugiés doit être notre mot d’ordre tant que les guerres impérialistes et le néocolonialisme continueront à produire cette « misère du monde ».
5. Que l’État français est un des plus impliqués dans ce nouveau cycle de guerres coloniales et qu’il maintient des rapports coloniaux avec la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Kanaky, la Réunion, Mayotte et la Polynésie. En 2017 se déroulera le référendum d’autodétermination en Kanaky et déjà les manoeuvres administratives visant à modeler le corps électoral afin de rendre l’indépendance impossible, se multiplient.
6. Que les politiques ultralibérales s’intensifient en France. La loi El Khomri n’en est que le dernier exemple. Le mouvement social actuel est à soutenir sans restriction. Il faut cependant rappeler que cette précarité que la loi veut légaliser et étendre, est déjà le lot des immigrations et des quartiers populaires depuis bien longtemps. Il en est de même avec la violence policière massive à l’encontre des manifestant-e-s. Cette violence nous la connaissons depuis longtemps et à longueur de journée dans nos quartiers populaires. Elle a déjà fait des centaines de morts ces dernières décennies.
7. Que l’état d’urgence prolongé plusieurs fois avec l’accord des principales forces politiques y compris de « gauche » n’est qu’un outil permettant une mise sous surveillance accrue des militant-e-s et de leurs organisations et une répression plus intense de notre colère légitime.
AU VU DE TOUTES CES ANALYSES, LES SIXIÈMES
RENCONTRES NATIONALES DES LUTTES DE L’IMMIGRATION
Appellent
1. À intensifier la création de collectifs du Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires dans chacune des villes de France afin de prendre en charge de manière convergente le combat contre les dominations de classe, de « race » et de sexe. Déjà nous sommes passé-e-s d’un mouvement embryonnaire à une présence dans cinq régions. Nous appelons chaque collectif local à multiplier les initiatives pour susciter de nouveaux collectifs dans leur région. Nous appelons chaque militante et militant des autres régions en accord avec notre combat à « sauter le pas » en créant son collectif.
2. À participer avec nos propres mots d’ordre et revendications au mouvement social actuel comme aux mouvements futurs. Il s’agit d’y participer pour faire avancer la lutte commune mais aussi pour faire dénoncer les oppressions spécifiques qui sont les nôtres (islamophobie d’État, discriminations racistes et sexistes systémiques, lien entre l’ultralibéralisme ici et les guerres impérialistes, droits des Chibanis, etc.).
3. À participer à toutes les initiatives allant dans le sens d’un véritable mouvement contre les guerres impérialistes, pour le retrait international de l’armée française, et la dénonciation de ses exactions (dont les viols en Centrafrique).
4. A Soutenir et relayer les luttes panafricaines pour la fin du franc CFA, monnaie coloniale, outil de contrôle politique et économique de la France sur 15 pays africains.
Décident
1. La tenue des Septièmes Rencontres des luttes de l’immigration et des quartiers populaires au printemps prochain et confie son organisation au collectif FUIQP Sud. À la différence des précédentes ces rencontres comporteront une action militante publique nationale offensive.
2. Que chaque collectif élabore dans les plus brefs délais un programme de formation politique afin d’armer nos militantes et militants pour les durs combats qui nous attendent. Ce programme élaboré en fonction des besoins et réalités locaux comportera systématiquement une partie consacrée aux luttes de l’immigration et aux guerres impérialistes.
3. De lancer trois campagnes permanentes nationales portant :
1. sur la libération de notre président d’honneur Georges Ibrahim Abdallah,
2. sur les violences policières et les crimes racistes,
3. sur les guerres impérialistes, l’état d’urgence et l’islamophobie.
Ces campagnes se doteront d’un matériel national commun dont la préparation a été répartie entre nos collectifs.
4. D’initier trois campagnes spécifiques avec des actions décentralisées le même jour :
1. De soutien à l’indépendance de la Kanaky et de dénonciation des manoeuvres de l’État français ;
2. En soutien à la lutte des Chibanis ;
3. Pour porter la revendication de la reconnaissance de tous les massacres coloniaux comme crime contre l’humanité (Madagascar, Cameroun, Algérie, etc.).
5. De systématiser dans chaque collectif la tenue d’une table d’information et de mobilisation régulière dans un quartier ou un marché populaire.
6. De refuser de prendre les échéances présidentielles comme notre échéance. Il s’agit par ce refus de rester maître de notre agenda et de continuer à construire le FUIQP par le bas. Nous n’aurons donc pas de candidat-e et ne participerons à aucune candidature. Un tel refus ne nous prive pas, bien entendu, d’intervenir dans la campagne selon des modalités à choisir localement pour porter nos revendications et nos analyses.
7. De maintenir notre structures organisationnelles actuelles à savoir :
1. Des Rencontres nationales annuelles comme instance politique centrale ;
2. Des coordinations nationales trimestrielles de délégué-e-s des collectifs ;
3. Une organisation par collectif locaux autonomes et donc une impossibilité d’adhésions individuelles isolées;
4. La codécision avec le collectif local concerné avant toute prise de décision de participation à une initiative.
AUTONOMIE / AUTO-ORGANISATION / AUTODÉFENSE
« PAR TOUS LES MOYENS NÉCESSAIRES » (MALCOLM)
NOUS EXISTERONS POLITIQUEMENT (SAYAD)
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