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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

L’histoire des Roms en Europe : guérissons l’amnésie !

17 Février 2016 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Roms - tsiganes - voyageurs

Dans quelques jours, nous commémorerons la liquidation du « camp familial tsigane » d’Auschwitz-Birkenau où, le 2 août 1944, 2 897 personnes furent conduites dans les chambres à gaz pour y être exterminées. Quelques mois plus tôt, le 16 mai 1944, les détenus du « camp tsigane » avaient refusé d’obéir aux ordres des soldats SS venus pour les tuer. Aujourd’hui encore, le soulèvement des Roms et la liquidation du « camp tsigane » restent peu connus des sociétés européennes.

Un trou noir dans l’histoire européenne qui fait obstacle à la compréhension du présent

La connaissance de l’histoire des Roms en Europe est indispensable pour comprendre la situation actuelle. Si de nombreuses personnes que j’ai rencontrées ont des opinions sur les Roms, rares sont celles qui connaissent leur histoire. Par exemple, la plupart ne savent pas qu’à partir de 1501, les Roms, bannis du Saint-Empire romain germanique, peuvent être pris et tués par n’importe quel citoyen. En France, Louis XIV prend une ordonnance en 1666, qui impose d’envoyer les Tsiganes de sexe masculin aux galères à vie sans procès, de stériliser leurs femmes et d’enfermer leurs enfants dans des hospices. L’Espagne décide en 1749 de faire prisonniers tous les Roms dans une opération connue sous le nom de « Grande rafle des Gitans ». Dans une partie de la Roumanie actuelle (Valachie et Moldavie), les Roms sont soumis à l’esclavage entre le XIVe siècle et 1856. L’impératrice d’Autriche Marie-Thérèse impose une politique d’assimilation très dure qui consiste entre autres à enlever les enfants à leurs parents.

Plus récemment, des enfants roms et yéniches ont été enlevés de force à leurs familles en Suisse au prétexte que leurs parents n’étaient pas capables de les éduquer en bon citoyens. De même, on ne sait guère qu’en France, les Roms détenus dans des camps sur le territoire français pendant la Deuxième guerre mondiale sont restés dans certains cas en détention dans des conditions déplorables jusqu’à la fin de 1946 ou que les survivants roms des camps de concentration nazis ont été abandonnés sans aucune aide et privés de leur nationalité bien après 1945.

Le « Pharrajimos » - Holocauste des Roms – mis en œuvre pendant la Deuxième guerre mondiale fut le sommet de ces politiques d’exclusion, d’élimination et d’assimilation forcée. Environ 90 % de la population rom de certains pays a disparu à la suite des massacres et des déportations dans des camps de concentration. Mais, 70 ans après la fin de la guerre, le travail de mémoire sur le sort des Roms est encore lacunaire. Mon rapport sur la République tchèque (2013), par exemple, rappelle qu’il y a toujours une porcherie sur le site de l’ancien camp de travail de Lety, où les Roms étaient détenus pendant la Deuxième guerre mondiale avant d’être déportés à Auschwitz.

Il est très inquiétant que certains responsables politiques appartenant à des partis traditionnels se soient permis, dans le contexte de la montée du populisme en Europe, de cautionner publiquement l’Holocauste des Roms. En plus de banaliser certaines des violations des droits de l'homme les plus atroces du passé, ce genre de discours renforce et légitime le racisme anti-rom actuel.

Quand on a à l’esprit ce passé tragique, on comprend mieux pourquoi certains Roms ont du mal aujourd’hui à faire confiance aux sociétés majoritaires et aux institutions publiques. On ne peut négliger le lourd héritage des pratiques passées de stérilisation forcée, d’enlèvement d’enfants et de profilage ethnique quand on considère les relations que les communautés roms ont aujourd‘hui avec la police ou les administrations publiques en général.

L’ignorance du passé engendre la perpétuation des violations des droits de l'homme

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