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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Reprenons l’initiative ! Appel contre les politiques de racialisation

30 Avril 2015 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Quartiers populaires, #Informations militantes, #Racisme

REPRENONS L’INITATIVE

FORUM contre les politiques de racialisation

Gennevilliers 9 MAI 2015

Comme toutes les formes de domination, le racisme est un rapport social qui s’adapte aux évolutions des contextes économiques, politiques et idéologiques. Si le racisme biologique n’a pas disparu, le racisme culturel gagne en importance. C’est pourquoi le racisme n’est pas seulement une affaire de couleur de peau : la négrophobie se dit aujourd’hui souvent en termes culturels, et l’islamophobie vise tout autant les convertis que les Français « issus de l’immigration ». Le racisme ne se réduit pas à des idéologies racialistes. Il est aussi inscrit, selon une deuxième logique, dans des pratiques quotidiennes de discriminations raciales qui structurent nos sociétés : elles sont systémiques et quasi-systématiques, voire institutionnalisées. C’est la troisième dimension du racisme : les politiques publiques jouent un rôle crucial. Bien sûr, elles peuvent combattre les discours et les discriminations racistes ; mais elles peuvent aussi les autoriser – non seulement en les tolérant, mais aussi en produisant les conditions sociales qui les nourrissent. On en voit la forme exacerbée dans la politique à l’égard des Rroms : le racisme d’en bas se nourrit en effet de la racialisation d’en haut. De même qu’on peut parler, à propos d’immigration, d’une xénophobie d’État, il convient donc de nommer une politique de la race.

Un antiracisme qui ne prendrait pas en compte ces trois aspects serait non seulement incapable de faire reculer le rapport social raciste qui se répand en France mais contribuerait à le renforcer. Face aux nouveaux visages du racisme nous devons reprendre l’initiative Pour reprendre l’initiative, il nous faut débattre, agir ensemble, faire sauter des verrous idéologiques.

racisme-egalite

PLENIERE : DE QUEL ANTIRACISME AVONS-NOUS BESOIN ?

L’Islamophobie légitimée par l’État  depuis la loi sur les signes religieux en 2004, la négrophobie défendue par un président de la République depuis le discours de Dakar de 2007, la Rromophobie encouragée par les ministres de l’intérieur des majorités successives, etc. : un seuil qualitatif est bien franchi dans le développement d’une politique de racialisation impulsée par l’État qui la délègue ensuite aux collectivités locales. Il ne s’agit pas seulement de discours : on voit les effets de cette politique dans la hausse des agressions et crimes racistes. Reprendre l’initiative c’est définir ensemble l’antiracisme dont nous avons besoin aujourd’hui pour réagir en partant de la responsabilité politique, et non du racisme social qui en est l’effet plus que la cause.

ATELIERS : POUR UN ANTIRACISME DE COMBAT

Atelier 1 : Le combat idéologique

Quels sont les verrous de la pensée qui entravent la force d’un mouvement antiraciste à la hauteur des enjeux politiques pour résister aux illusions et aux dangers de l’intégrationnisme, du « racisme anti-blanc », de l’antiracisme moral, etc. ? Comment mener un combat idéologique efficace contre les nouvelles figures du racisme ? Quels outils pour ce combat ?

Atelier 2 : Les mobilisations militantes

Quelles mobilisations militantes contre les nouvelles formes de racisme ? Quelles mobilisations spécifiques sur chaque forme de racisme mais aussi quelle convergence construire ? Quelles luttes développer contre la racialisation d’État et la politique de la race municipalisée qui en découle ? Quelles alliances égalitaires avec les mouvements actuels ou futurs des racisés ? Quelle initiative centrale de visibilisation politique de Reprenons l’initiative ?

Atelier 3 : Les outils nécessaires

De quels outils avons-nous besoin pour mener le combat idéologique et le combat social ?

PLENIERE : AGIR EFFICACEMENT A LA HAUTEUR DES ENJEUX

  • - Restitution des ateliers
  • - Quelles actions communes avec quels objectifs et quelles échéances.

Nous assistons actuellement à une régression idéologique : l’antiracisme se réduit trop souvent à un combat contre le racisme individuel à l’occasion de « dérapages » qui se multiplient effectivement. C’est minimiser la réalité du racisme systémique, c’est-à-dire, au-delà des idéologies racistes, des discriminations au quotidien, mais c’est aussi occulter le rôle du racisme institutionnel : le traitement étatique et municipal des populations rroms venues de Roumanie ou de Bulgarie, pays membres de l’Union européenne, en est l’illustration la plus brutale.

En France, depuis dix ans, des familles rroms ont subi une quinzaine d’expulsions qui les rejettent toujours davantage dans la misère la plus extrême. Les démantèlements à répétition de bidonvilles continuent sous François Hollande comme sous Nicolas Sarkozy, à la demande de municipalités de la majorité gouvernementale d’hier comme de celle d’aujourd’hui. Ce n’est que la partie la plus visible de pratiques non seulement scandaleuses, mais aussi illégales, qui se banalisent : refus de domiciliation au CCAS ici, entraves à la scolarisation des enfants là, non-ramassage des ordures ménagères ici et là, etc. Il s’agit d’un processus massif de marginalisation, d’exclusion et de stigmatisation d’une population.

Pour justifier ces actes inhumains, à l’instar de Manuel Valls, les responsables prétendent tantôt qu’ils agissent pour le bien des Rroms en détruisant un habitat insalubre, tantôt que ceux-ci « ne souhaitent pas s’intégrer dans notre pays pour des raisons culturelles ». En réalité, comme on l’a vu pendant les élections municipales, les politiques n’hésitent pas à faire campagne en promettant une véritable chasse aux Rroms.

Nous sommes bien en présence d’une « politique de la race » : on assigne les Rroms à une différence supposément culturelle pour justifier en retour de les traiter de manière discriminatoire. Cette persécution se déroule dans l’indifférence générale, voire avec une approbation presque consensuelle : en effet, les majorités successives semblent avoir réussi à dépolitiser la « question rom », en donnant l’impression que les élus, tant locaux que nationaux, ne font que gérer un problème – et non mener une politique à laquelle on pourrait opposer une autre politique.

Si le traitement des Rroms est un exemple extrême, les politiques de racialisation concernent pareillement d’autres catégories de la population. C’est le cas depuis longtemps avec l’injonction d’intégration adressée, non seulement aux immigrés, mais aussi à leurs enfants, voire à leurs petits-enfants, comme si certains Français devaient éternellement faire la preuve de leur « identité nationale ». C’est aussi le cas avec le déchaînement d’islamophobie qui s’autorise de la laïcité pour jeter une suspicion a priori sur les musulmans dans leur ensemble, tout en récusant le terme même d’islamophobie. Et alors que les discriminations raciales en même temps que les idéologies racistes ont pour effet sinon pour visée de produire une opposition entre « eux » et « nous », le déni va parfois jusqu’à reprendre les attaques de l’extrême droite contre un supposé « racisme anti-blanc » au nom d’une rhétorique universaliste qui invisibilise les rapports de domination raciale.

Nous affirmons que la politique de la race qui vise les Rroms est un révélateur des politiques de racialisation qui touchent de larges pans de la société française : elle amplifie la logique qui se déploie pour l’ensemble des populations issues de l’immigration postcoloniale – et qui fait écho à une histoire marquée par l’esclavage, le colonialisme et le nazisme. Mais ce passé rencontre l’actualité d’une France et d’une Europe néolibérales où s’accroissent les inégalités de classes; ces politiques de stigmatisation servent ainsi à en distraire .

Il ne suffit plus de dénoncer les racistes, ni même les partis racistes. Il faut s’en prendre aux politiques de racialisation. Nous refusons d’accepter l’inacceptable, et d’être les complices ou même les témoins de l’organisation politique de la concurrence généralisée entre les victimes d’un même système inégalitaire. Les signataires appellent à une reprise collective de l’initiative, dans le respect de la diversité des opinions et analyses politiques au sein des mouvements antiracistes – à condition de se retrouver dans le constat que nous faisons ici.

Nous allons mener une campagne nationale (affiches, vidéos, débats, initiatives publiques, actions de mobilisation, etc.) contre la banalisation des pratiques discriminatoires touchant les Rroms comme les populations héritières de l’immigration postcoloniale ou de religion musulmane. Nous organiserons au printemps 2015 un vaste forum d’échanges et d’analyses politiques afin de contribuer au renouvellement d’un antiracisme politique. Enfin, nous nous engageons à soutenir les initiatives d’auto-organisation de celles et ceux que visent ces politiques de racialisation, précisément parce que ces politiques rendent plus difficiles de telles initiatives.

Il est encore temps, mais il est déjà grand temps.

Pour voir les signatures

 

Reprenons l’initiative ! Appel contre les politiques de racialisation

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