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Repères contre le racisme, pour la diversité et la solidarité internationale

Un racisme post-colonial (Saïd Bouamama)

10 Juillet 2019 , Rédigé par Repères anti-racistes Publié dans #Racisme, #Colonisation, #Extrême-droite

Un racisme post-colonial (Saïd Bouamama)

Le Parisien notamment vient de le révéler : une nouvelle fois, les plus hautes autorités de la République française viennent de porter atteinte à la liberté d’expression, et plus précisément à la nécessaire autonomie de la recherche scientifique et du travail social, en cédant à une demande de censure émanant de la droite dure et de l’extrême droite. C’est notre camarade et ami Saïd Bouamama qui cette fois-ci fait les frais d’une abjecte campagne menée principalement par le Rassemblement National et sa presse quasi organique : Le Figaro et Valeurs Actuelles. Interdit de séjour dans un colloque de trois jours dont il avait pourtant été l’une des chevilles ouvrières, et cela sur simple décision d’un ministère de l’Intérieur lui-même soumis aux desiderata d’une extrême droite xénophobe et obscurantiste, Saïd mérite un large soutien. Nous nous associons donc à la pétition que vient de publier Mediapart, et nous republions un texte co-écrit avec lui, consacré à ce qui semble bel et bien être le ressort de cette extravagante et brutale ingérence étatique : le racisme.

À la question « Peut-on parler d’un racisme post-colonial ? », nous répondons par une autre question : Comment peut-on ne pas en parler ? Comment peut-on parler des formes contemporaines du racisme sans évoquer deux de ses principales généalogies : les systèmes esclavagiste et colonial ? Comment peut-on nier qu’existe aujourd’hui un profond racisme qui trouve son fondement dans des institutions, des pratiques, des discours et des représentations qui se sont élaborées dans le cadre de l’empire colonial français ? [1]

Comment peut-on le nier, par exemple, alors que les enquêtes d’opinion mettent en évidence une forme de mépris ou de rejet spécifique, plus fort et plus durable, à l’encontre des immigrés originaires de pays colonisés ? De ces enquêtes  [2], il ressort en effet que, depuis plusieurs décennies, deux phénomènes sont observables : d’une part, les vagues d’immigration les plus récentes sont toujours les plus dépréciées, les plus craintes ou les plus méprisées, tandis que le temps dissipe peu à peu cette crainte et ce mépris ; d’autre part, les immigrés issus de pays anciennement colonisés, notamment d’Afrique, font exception à cette première règle.

En d’autres termes, il convient de distinguer le stigmate xénophobe, qui n’existe sous une forme exacerbée que pour les nouveaux arrivants, et le stigmate raciste, qui cristallise des représentations beaucoup plus profondément enracinées, et qui par conséquent ne perd pas - ou très peu - de sa force avec le renouvellement des générations et leur enracinement en France. Si les immigrants italiens, polonais, arméniens ou portugais ont pu être, à leur arrivée en France, l’objet de discours infâmants et de mesures discriminatoires d’une grande brutalité, souvent comparables par leur forme et par leur violence à ce que subissent aujourd’hui les immigrants post-coloniaux [3], il n’en est pas allé de même pour leurs enfants, et moins encore pour leurs petits-enfants. On ne peut pas en dire autant des enfants d’immigrés maghrébins ou noirs-Africains, seuls condamnés à l’appellation absurde - mais éloquente politiquement – d’« immigrés de la deuxième ou troisième génération », et aux discriminations qui l’accompagnent.

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